Urgence d’une politique indépendante et cohérente sur les pesticides, la santé publique et l’eau potable : lettre ouverte à Lecornu

Secrets Toxiques Tour de France dans le Finistère : preogramme

Lettre ouverte à Monsieur le Premier ministre Sébastien Lecornu

Objet : Urgence d’une politique indépendante et cohérente sur les pesticides, la santé publique et l’eau potable


Monsieur le Premier Ministre,

Nous vous écrivons avec gravité à la suite des révélations publiées par Le Monde, selon lesquelles le ministère de l’Agriculture aurait exercé des pressions sur la rédaction du volet consacré aux pesticides dans le rapport du Haut-Commissariat à la Stratégie et au Plan (HCSP).
Ces interventions, visant à édulcorer ou retarder la publication de conclusions scientifiques gênantes, sont extrêmement préoccupantes.
Elles portent atteinte à la crédibilité des institutions publiques, au droit des citoyens à une information indépendante et à la sécurité sanitaire nationale.

Il ne s’agit pas d’un simple différend administratif. C’est un signal d’alerte politique.
Lorsqu’un ministère chargé de l’agriculture interfère dans l’évaluation des risques sanitaires des pesticides, il devient juge et partie, et met en péril la santé publique.
Dans ce contexte, le maintien de la ministre actuelle, après de telles accusations, affaiblit la confiance du public et empêche la mise en œuvre d’une politique de transition agricole crédible.
Nous demandons donc son remplacement immédiat par une personnalité indépendante, compétente et résolument engagée pour la transparence et la santé environnementale.

Un désastre sanitaire et financier sous-estimé
Les chiffres disponibles dressent un constat accablant :
– Les coûts sociaux liés aux pesticides (santé, dépollution, perte de biodiversité) s’élèvent à minima à 370 millions d’euros par an en France, dont 260 millions pour le traitement de l’eau potable, et potentiellement jusqu’à 8,2 milliards d’euros1
– L’expertise INSERM (2021) a mis en évidence des liens forts ou moyens entre l’exposition aux pesticides et 16 pathologies graves, dont plusieurs cancers, maladies neurodégénératives et troubles de la reproduction.
– Les agriculteurs exposés présentent un risque accru de +47 % de lymphomes plasmocytaires et +25 % de myélomes.
– À l’échelle nationale, le nombre de cancers a presque doublé depuis 1990, avec une progression plus forte chez les femmes et les jeunes adultes.

Ces données illustrent la contradiction entre un discours officiel de réduction des pesticides et la réalité d’un système sous influence, où les arbitrages ministériels privilégient encore les intérêts industriels au détriment de la santé publique.

L’eau potable est la première victime silencieuse. Les contrôles de qualité montrent que plus d’un tiers des points de captage en France présentent des traces de pesticides ou de leurs métabolites au-delà des seuils réglementaires.
Certaines molécules interdites depuis plus de dix ans, comme l’atrazine, continuent de polluer les nappes phréatiques.
Le coût de la dépollution est exorbitant, mais la pollution, elle, reste légalement tolérée tant que les traitements permettent de “corriger” l’eau avant sa distribution.
Cette logique est intenable : il faut prévenir la contamination à la source, pas seulement la traiter à la sortie du robinet.
La situation exige un sursaut politique et moral. Nous vous demandons :

. Le remplacement de la ministre de l’Agriculture, afin de garantir l’indépendance de la politique publique sur les pesticides.
. La publication intégrale et sans censure du rapport du HCSP, avec les noms des experts consultés et les corrections demandées par le ministère.
. La réorientation des aides de la PAC pour un financement fort et engagé dans la transition agro-écologique
. L’intégration, dans la loi de financement de la sécurité sociale, d’un compte spécifique retraçant les coûts des pathologies environnementales afin d’en mesurer le poids réel.

Le courage politique ne consiste pas à temporiser, mais à protéger la population quand les faits sont établis.
La France ne peut plus ignorer le coût humain et financier d’une dépendance aux pesticides qui ruine notre santé, notre eau et notre modèle social.

Nous appelons votre gouvernement à faire preuve de transparence, d’indépendance et de responsabilité en plaçant la santé publique au-dessus des intérêts économiques sectoriels.

Dans l’attente d’une réponse claire à cette demande, nous vous prions de croire, Monsieur le Premier Ministre, en l’expression de notre très haute considération

PestiRiv : enfin sortie le 15 septembre !

Mettre la charrue avant les boeufs, c’est bien ce qui vient de se passer avec le vote de la loi Duplomb avant la sortie de l’étude PestiRiv, censée éclairer le choix de nos « représentants » nationaux…

La loi duplomb a été votée le 8 juillet et l’étude PestiRiv a été débloquée des tiroirs d’un ministère le 15 septembre.
Il fallait bien qu’elle soit habillée politiquement, après que les résultats scientifiques aient été connus dès le mois de juin dernier…

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Communiqué de presse des associations  Alerte Médecins Pesticides (AMLP) et Alerte Pesticides Haute Gironde (APHG)

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Communiqué de presse PestiRiv

L’enquête Pestiriv paraît aujourd’hui, 12 ans après la première saisine de la Cellule de l’Institut de veille sanitaire sur une suspicion d’agrégat de cancers pédiatriques à Preignac en Sud-Gironde, 11 ans après l’affaire de Villeneuve de Blaye en Nord-Gironde, citées parmi les amonts de cette étude.

Grâce au signalement de l’association Alerte des Médecins sur Les Pesticides (AMLP) la saisine de la DGS pour Preignac a débouché sur l’étude Geocap-Agri. Au bout de 5 ans, celle-ci a révélé sur la base d’un travail statistique rigoureux, qu’il existe bien un sur-risque d’avoir une leucémie aigüe pour les enfants de moins de 15 ans lorsqu’ils vivent dans un environnement de vignes, et ce jusqu’à 1 km de distance.

Les mesures des AASQA sur la qualité de l’air comme celles d’ATMO-Nouvelle Aquitaine détectent déjà dans l’air de nos villes et de nos champs des concentrations de pesticides agricoles non négligeables. De nombreux prélèvements dans les cheveux des enfants ont déjà été réalisés près des vignes (dans le Médoc, à Léognan) ou près des grandes cultures en Charente-Maritime, à l’initiative de parents riverains, prélèvements qui ont confirmé une imprégnation généralisée.

Nous comprenons que le temps de la science soit long et nous souhaitons que priorité soir donnée à la rigueur scientifique. Il était donc important de mesurer cette exposition pour les riverains des parcelles, de la comparer à l’exposition domestique, en prenant en compte la distance, le moment de l’année … Les résultats de Pestiriv confirment ce que tout le monde sait : on est davantage exposé lorsqu’on habite près des vignes que lorsqu’on habite loin. La distance de 500 m mentionnée dans le rapport rend au passage dérisoires les distances d’épandage de 3, 5 ou 10 m. En outre, et c’est le fait majeur de l’étude, elle indique qu’en période d’épandage les enfants de 3 à 6 ans sont plus imprégnés que les adultes !

D’autres données scientifiques alertent sur le lien entre l’exposition aux pesticides et certaines maladies comme l’expertise collective de l’INSERM de 2021 ainsi que des préoccupations majeures sur les risques d’une contamination au moment de la vie in utéro.

Nous pensons qu’il est évident et urgent de mettre en rapport les données de GeoCap-Agri, cette expertise de l’INSERM, et les résultats de PestiRiv pour réfléchir à des mesures de prévention permettant de protéger efficacement les populations. Elles consistent a minima, à :

  • réduire de façon significative les pesticides à la source, en soutenant massivement l’agriculture bio (les plans Ecophyto successifs ont montré leur incapacité à opérer cette réduction)

  • décider de périmètres de protection suffisants autour des écoles, des lieux de vie, négociés avec les habitants et les agriculteurs, et des mesures dans l’élaboration des PLUi qui prévoient ces périmètres.

Si les pouvoirs publics veulent sincèrement se préoccuper de la santé des riverains, la communication en temps réel des produits épandus à la parcelle vers une base de données accessible aux chercheurs doit être rendue automatique. C’est un élément indispensable pour mener des études épidémiologiques sérieuses, comme l’ont encore réclamé près de 1300 chercheurs et médecins dans une lettre ouverte récemment.

De même la situation impose que l’évaluation de la toxicité à long terme des formulations complètes des pesticides (substances actives + tous les co-formulants), effets cocktails compris, soit faite comme l’impose le règlement européen 1107/2009, sur la base d’études scientifiques indépendantes. C’est ce que nos associations réclament avec la coalition Secrets Toxiques. C’est ce qu’a exigé la Cour administrative d’appel de Paris le 3/09/25 : elle demande à l’État de mettre en oeuvre une évaluation des risques présentés

par les produits « à la lumière du dernier état des connaissances scientifiques », et de procéder, « au réexamen des autorisations de mises sur le marché déjà délivrées et pour lesquelles la méthodologie d’évaluation n’aurait pas été conforme à ces exigences » !

Les riverains, pas plus que les agriculteurs, ne veulent être les cobayes des trous dans la raquette de l’évaluation des pesticides. C’est le même État français qui affirme n’autoriser la mise sur le marché que de produits « aux risques contrôlés » et qui dans le même temps indemnise les victimes des pesticides de plus en plus nombreuses (même si leur nombre est certainement très inférieur au nombre réel de cas).

Aujourd’hui les dépenses de santé, de protection de la biodiversité, d’épuration de l’eau potable liées aux pesticides coûtent des centaines de millions à la société1. Notre pays doit investir dans un vaste plan de conversion de notre agriculture vers un modèle agro-écologique qui garantisse la protection des écosystèmes et des humains et qui permette aux agriculteurs de vivre de leur travail.

Contacts APHG : Henri Plandé 06 13 11 25 00 et Sylvie Nony 06 51 55 96 07

Contacts AMLP : Pierre-Michel Périnaud 06 31 23 66 72 et Michel Campano 06 26 69 41 39

PESTICIDES INTERDITS : BASF tente d’étouffer un scandale avéré, l’Etat doit réagir (CP Conf)

PESTICIDES INTERDITS : BASF tente d’étouffer un scandale avéré,

l’Etat doit réagir

Le 23 juin 2025, une inspection citoyenne des faucheuses et faucheurs volontaires d’OGM a été menée sur le site Chimique de BASF à Genay. Cette inspection a révélé que BASF continue de produire du Fastac (pesticide interdit en France) ainsi que sa matière active : l’alpha-cyperméthrine, substance interdite dans toute l’union européenne.

La DREAL (direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement) a confirmé ces révélations suite au contrôle qu’elle a réalisé le 30 juin, à la demande du ministère de la Transition écologique.

Nous nous étonnons que la communication de la préfecture ne se limite qu’à l’unique constat de la présence du Fastac, alors même qu’un autre pesticide interdit, le Dimpropyridaz a été également identifié au cours de l’inspection citoyenne. Cette matière active n’étant pas approuvée au niveau européen, elle est donc également interdite.

Depuis 2019, BASF n’a pas fourni les documents demandés sur la toxicité de certains éléments de son produit et tente de faire passer l’interdiction du Fastac pour un simple retrait administratif. Cela ne doit pas lui permettre de contourner le droit en continuant de produire en France et de transporter pour l’export le Fastac interdit. L’Etat doit tout mettre en œuvre pour empêcher ce contournement de la loi et mettre fin à ces pratiques odieuses

Alors que la pétition contre la loi Duplomb a dépassé, le week-end dernier, les deux millions de signatures, montrant notamment un rejet massif du système agrochimique par la population française :

  • Nous exigeons la publication de l’intégralité du rapport de la DREAL concernant le contrôle de BASF à Genay (69).

  • Nous exigeons de la DREAL des inspections qui recherchent l’intégralité des substances et produits interdits présents sur le site de Genay (69) ainsi que sur tous les autres sites agro- chimiques.

  • Nous demandons que l’État fasse cesser ces pratiques et que la justice poursuive et

condamne les entreprises ne respectant pas le cadre de la loi.

  • Nous exigeons que l’État Français prenne des mesures strictes pour empêcher ce colonialisme agrochimique : la production et l’exportation de substances hautement toxiques et interdites en Europe, qui détruisent la santé des travailleuses et travailleurs et qui impactent gravement l’environnement sur la planète entière.

La Confédération paysanne continuera à se battre pour des changements systémiques de notre économie pour qu’enfin nous puissions sortir de ce système agro-chimique mortifère poussé par des lobbys puissants favorisant leurs profits à notre santé et l’environnement.

Contacts : 

  • Thomas Gibert, porte-parole national : 06 65 24 66 44
  • Bastien Moysan, secrétaire national : 07 69 43 94 15
  • Jean-Luc Juthier, paysan retraité : 06 41 41 51 54

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