Les agriculteurs pataugent avec leurs bassines. Le Conseil d’Etat a confirmé vendredi l’interdiction de remplir les cinq «bassines» controversées à usage agricole, qui font l’objet de nombreuses manifestations en Charente-Maritime. Dans un avis dont l’AFP a obtenu une copie, le Conseil d’Etat rejette ainsi le pourvoi de l’association syndicale des Roches, représentant les irrigants qui souhaitent prélever le bassin de la rivière Le Mignon, sur les communes de La Laigne, Cramchaban et la Grève-sur-le-Mignon (Charente-Maritime).
Depuis leur création en 2010, ces retenues autorisées par arrêtés préfectoraux ont donné lieu à nombre de recours de Nature Environnement 17 qui s’oppose à leur usage, comme pour celles toutes proches des Deux-Sèvres. Dans son jugement du 17 mai, la cour administrative d’appel de Bordeaux avait interdit de les remplir, notant «l’insuffisance» ou «l’absence de données» de certains aspects des études d’impact avancées par les irrigants, notamment sur les effets des prélèvements, l’absence de sources de certains chiffres avancés ou des mesures ne permettant pas un «ajustement pertinent» du remplissage des réserves.
Pour demander l’annulation de l’arrêt de la cour administrative d’appel de Bordeaux, l’association syndicale des Roches soutenait que ce dernier était entaché «d’une insuffisance de motivation en ce qu’il se fonde sur des motifs hypothétiques» et plusieurs «dénaturations des pièces du dossier». Mais pour le Conseil d’Etat, «aucun de ces moyens n’est de nature à permettre l’admission du pourvoi».
5,5 millions d’euros «perdus»
Les projets de création de ces retenues d’eau controversées – des bassins à ciel ouvert, recouverts d’une immense bâche en plastique -, donnent lieu depuis des années à des manifestations, quelquefois avec heurts, organisées par des opposants qui dénoncent un «accaparement de l’eau» au profit de l’«agro-industrie».
«On s’y attendait. On va refaire une demande d’autorisation encore une fois avec une nouvelle étude d’impact mais cela prend du temps», a réagi à l’AFP Thierry Boucard, qui préside l’association. Laquelle «n’a aucune obligation à reboucher les réserves» car «légales». «Si on abandonne, c’est 5,5 millions d’euros perdus, dont 67 % d’argent public», déplore-t-il. Avec cette décision, «on donne un permis de les dégrader».
Deux militants anti-bassines étaient jugés début janvier devant le tribunal de la Rochelle pour avoir cisaillé et découpé à coups de cutters et de ciseaux une bâche de la retenue de Cramchaban en novembre 2021. Cinq mois de prison avec sursis ont été requis à leur encontre, la décision a été mise en délibéré au 2 mars.
Aujourd’hui, jeudi 2 mars, le tribunal de la Rochelle a rendu son délibéré concernant l’action menée par le CollectifBassines Non Merci, les Soulèvements de la Terre et la Confédération Paysanne ayant abouti à la mise hors-service de laméga-bassine illégalement remplie de Cram-Chaban. Malgré les centaines de pages de dossier et les moyens déployés pour l’enquête, les deux militants n’ont été condamné qu’à une amende. https://bassinesnonmerci.fr/wp-content/uploads/2023/03/CP-Jugement-du-debachage-de-la-bassine-de-Cram-Chaban-1.pdf
–> L’afficheur varois Michel-Ange Flori, 62 ans, ancien publicitaire, avait publié, le 19 juillet 2021, en plein débat sur le pass sanitaire, des affiches représentant le président Emmanuel Macron en Adolf Hitler. A la Seyne sur mer et à Toulon.
–> Le président de la République porte plainte après cette publication, fin juillet 2021, pour « injures publiques » au président de la République
–> Le 12 août, Michel-Ange Flori publie une nouvelle affiche représentant le président en maréchal Pétain.
–> le publicitaire Michel Ange Flori fait appel et en janvier 2022, la cour d’appel d’Aix-en-Provence le condamne à 5.000 euros d’amende
–> Michel Ange Flori se pourvoit en cassation.
Arrêt de la cour de Cassation du 13 décembre 2022 :
Motivation :
Vu l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme :
–> La liberté d’expression ne peut être soumise à des ingérences que dans les cas où celles-ci constituent des mesures nécessaires au regard du paragraphe 2 de ce texte.
–> Pour dire établi le délit d’injure publique, l’arrêt attaqué énonce notamment que l’assimilation de l’actuel président à une figure emblématique du nazisme et au dirigeant du régime de Vichy est une injure.
–> Les juges ajoutent que, si les affiches s’inscrivent clairement dans le débat d’intérêt général sur le passe vaccinal, le droit de recourir à la satire n’autorisait pas pour autant M. [H] à assimiler M. [E] au plus haut dignitaire de l’Allemagne nazie et au plus haut dignitaire du régime de Vichy.
–> Ils en déduisent que M. [H] a dépassé les limites de la liberté d’expression au sens de l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme.
–> En se déterminant ainsi, la cour d’appel a méconnu le sens et la portée du texte susvisé et du principe ci-dessus énoncé.
–> En premier lieu, les photomontages en cause, pour outrageants qu’ils fussent vis-à-vis de l’actuel Président de la République, se sont inscrits dans le débat d’intérêt généralet la polémique qui s’est développée au sujet du passe vaccinal contre le virus du Covid.
–> En second lieu, l’auteur s’est placé sur un mode satirique résultant, pour la première affiche, de la mention « affichage satirique et parodique »et, pour la seconde, du jeu de mots « il n’y a qu’un pass à franchir », de sorte que les affiches incriminées n’ont pas dépassé les limites admissibles de la liberté d’expression.
–> La cassation est par conséquent encourue.
–> Elle aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation
Dispositif :
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu d’examiner le second moyen de cassation proposé, la Cour :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt susvisé de la cour d’appel d’Aix-en-Provence, en date du 24 janvier 2022 ;
DIT n’y avoir lieu à renvoi ;
RAPPELLE que, du fait de la présente décision, le jugement de première instance perd toute force exécutoire ;
ORDONNE l’impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d’appel d’Aix-en-Provence et sa mention en marge ou à la suite de l’arrêt annulé.
Résumé :
La plus haute juridiction française a estimé « que les affiches incriminées n’ont pas dépassé les limites admissibles de la liberté d’expression », l’afficheur ayant notamment apposé une mention indiquant le caractère satirique sur l’une des affiches. « L’auteur s’est placé sur un mode satirique résultant, pour la première affiche, de la mention ‘affichage satirique et parodique’ et, pour la seconde, du jeu de mots ‘il n’y a qu’un pass à franchir' », ajoute la Cour de cassation.
16 organisations et 69 entreprises signent un texte commun
Soutien au développement des filières d’agriculture bio
à partir des régions.
Les analyses savantes d’économistes sur la crise que traverse la bio, la réduisant à une niche de marché, relèvent d’une pensée qui considère
que les lois du marché surdéterminent tout le reste, et cela même
quand leur application hégémonique entraîne la dépendance envers des régimes hostiles, quand des pénuries conduisent à des famines,
ou encore à la destruction des écosystèmes, constituant ainsi une menace pour l’avenir de l’humanité.
C’est une pensée hors sol, et désormais dangereuse.
C’est cette même pensée de courte vue qui conduisait, il n’y a pas si longtemps, l’ancien ministre de l’agriculture, Stéphane Travers, à
supprimer les aides de la PAC à l’agriculture biologique au prétexte que son marché était en croissance : raison pour laquelle aujourd’hui des agriculteurs qui ont fait le choix de la conversion en bio font face à des
difficultés économiques.
« En même temps », cette soumission de la décision politique au
tout-marché conduit, sans peur de la contradiction insensée, à subventionner des fermes usines, des méga-bassines, des méthaniseurs, à favoriser la concentration des exploitations tout en cherchant des solutions
pour redynamiser la vie rurale, à dépenser sans compter de l’argent public pour ramasser des algues vertes sur les rives, pour dépolluer l’eau, pour soigner les personnes rendues malade de manger et produire ce qu’il ne convient plus d’appeler des aliments, en bref, à tenir à bout de bras un modèle dans la triple impasse économique, écologique et sociale.
L’invocation du marché, c’est l’argument fataliste, celui de la résignation. S’il avait fallu que les acteurs de la filière bio attendent que le marché soit prêt pour s’engager, il n’y aurait pas de marché de la bio !
C’est d’abord parce que la bio porte un projet de société que ce marché s’est créé (et non l’inverse !), grâce à des acteurs qui ont pris des risques professionnels et financiers pour garder une cohérence professionnelle.
Mais nul n’est dupe, l’invocation du marché, c’est aussi l’argument cynique, la ritournelle – qui accompagne les appétits féroces de
l’agro-business, pour désosser la filière bio à coups de contrats d’intégration.
La qualité de l’agriculture biologique est certaine ; elle doit encore évoluer, et rehausser son niveau d’ambition afin de pouvoir rendre toutes les agricultures biologiques.
Rehausser son niveau d’ambition pour que les producteurs bio n’aient plus à payer pour la mise en marché de leur production, pour que la biologie soit la règle dans toutes les pratiques agricoles, et que l’usage de pesticides et d’herbicides soit interdit par la loi.
Rehausser son niveau d’ambition pour que les consommateurs n’aient pas à endosser sur leurs seules épaules le manque de responsabilité politique. Rehausser le niveau d’ambition en refusant qu’un Français sur dix soit contraint à l’aide alimentaire, en exigeant une meilleure répartition des richesses.
Redisons-le : la « démocratisation de la bio » vantée par la Grande Distribution en ubérisant l’ensemble du monde du travail est une escroquerie.
Et on ne peut que déplorer que, depuis des années, les gouvernements successifs, en lien avec l’agro-business, aient dénigré systématiquement la certification AB en la mettant en concurrence avec d’autres labels bien moins engageants (agriculture raisonnée, HVE).
Rehausser le niveau d’ambition bio, c’est travailler avec le vivant, renforcer d’un côté la compréhension biologique des espèces animales et végétales, leurs interactions ;
c’est combattre de l’autre les politiques agro-alimentaires d’artificialisation du vivant par des OGM (anciens ou nouveaux).
Ne pas soutenir dès maintenant la filière bio, c’est annuler des années de politiques locales qui ont accompagné les conversions en bio, c’est abandonner l’idée même de transition pourtant vitale.
Après la canicule vécue cet été, face à l’urgence climatique, le développement des filières bio reste plus que jamais un impératif
écologique, sanitaire et géopolitique de premier plan.
En effet, cela permettrait de ne pas dépendre de l’importation, ni de faire de
l’alimentation une arme pour asservir un peuple.
Or les engagements politiques nationaux sur la bio ne sont pas effectifs. A titre d’exemple, en 2009 lors du Grenelle de l’environnement, l’engagement était d’atteindre 20 % de produits bio en restauration collective en 2022, engagement rappelé dans la loi EGAlim en 2018…
Aujourd’hui, c’est à peine 6 % !
Rappelons que la bio, c’est d’abord et avant tout un projet de société qui doit être soutenu par des politiques publiques à l’échelle des territoires.
Par des élus qui ne doivent pas oublier que leur fonction est d’abord de servir la population.
Par des élus dont la charge est d’accompagner la structuration de rapport de
force afin de ne pas laisser les agriculteurs, les militants écologistes, les consommateurs, les syndicalistes, les transformateurs et les détaillants assumer seuls leur responsabilité, à se confronter seuls à la répression du
gouvernement ou encore à s’entredéchirer.
Ce projet de société se construit donc sur la base de rapports de force et de dialogue, cela doit conduire à des politiques publiques qui mobilisent les investissements massifs pour reterritorialiser les filières alimentaires à partir des régions.
Redisons la nécessité de :
l’aide aux agriculteurs biologiques et à la conversion
l’interdiction des pesticides
une politique foncière, encourageant l’installation en bio plutôt que l’agrandissement
la mise en place, à l’échelon des régions, d’une sécurité sociale de l’alimentation
la construction d’un système de distribution alimentaire résilient et efficace, basé sur la coopération entre acteurs régionaux plutôt que sur l’intégration.
Nos adversaires sont organisés et solidaires, à nous de l’être, luttes et initiatives doivent travailler de concert.
Retrouvez cette tribune, et plus encore, sur le site de MINGA :
Minga, Nature & Progrès,Bassines Non Merci, Le collectif Bretagne contre les fermes-usines, La confédération paysanne du Finistère, L’Alliance des Cuisinier·e·s, Université des sciences et des pratiques gastronomiques, Halte aux Marées Vertes, Pisseurs.sseuses Involontaires de Glyphosate BZH, Les faucheuses etfaucheurs Volontaires d’OGM de Bretagne, Normandie Équitable (collectif de 60 producteurs, commerçants, artisans et entreprises engagées en Normandie), Initiative Bio Bretagne, Confédération Paysanne du Morbihan, Bretagne Vivante, La Maison de la Bio(rassemble des organisations professionnelles de producteurs, transformateurs ou distributeurs de produits biologiques), Confédération paysanne d’Ille-et-Vilaine.
Entreprises:
Elles couvrent un large éventail de métiers (maraîchers, céréaliers, éleveurs, artisans semenciers, détaillants, brasseurs, restaurateurs, paludiers, grossistes, importateurs, boulangers, transformateurs…) et de statuts (agricole, artisanal, coopérative, GAEC…)
Azade l’épicier grossiste bio et solidaire du Nord de la France, la pépinière des fruits des fleurs (le Saint), Scic les 7 épis Biocoop (pays de Lorient), les Racines de Ciel -ligne de vêtements écologiques- (Quimper), Scic «Graines de Liberté – Hadoù ar Frankiz» (Quimper), SolAlter Importation et distribution de produits biologiques d’Équateur (Saint-Privat 07), la SCOP Aux Ateliers De La Liberté – l’Oie gourmande biscuiterie (Saint-Girons), la Scop La Falue Boulangerie (Caen), Scop Soleimiel – gamme de produit a base de miel (Port Sainte Marie), SCOP La clef des champs Biocoop (Landerneau), la société coopérative BIOCOOP nationale, SCOP Le Courtil Bio Biocoop (Lamballe), Terra Libra – Importateur et grossiste biologique engagé pour l’agriculture paysanne et des échanges équitables (Betton), Scop La Belz’Saison Biocoop (Belz), Youpi au Théâtre, restaurant (Gennevilliers), BOURGEONS – cultures végétales (Plouhinec 29), ID BIO importateur commerce équitable (Baixas), BaraTi’Pain, boulangerie (Baratier), MEUH COLA – LiMeuhnaderieartisanale de Normandie, La Cambuse «Chez Carlotta» – restaurant (Dieppe),La Cantine de Babel – traiteur (Cherbourg-en-Cotentin), Fourchette et bicyclette – traiteur (Saint-Nazaire), Comptoir du théâtre – Cuisinier indépendant (Quimper), Anatole – restaurateurs en transition (Bordeaux), Le Magasin Général – restaurant, (Bordeaux), La Belle Saison – restaurant (Bordeaux), Les chantiers de la Garonne – restaurant (Bordeaux), L’école La source – école de cuisine (Bordeaux – Pantin),Myrtille & Olive – épicerie bio de quartier (Nantes), Biogolfe – Biocoop (Vannes), EURL Popotes et Partages (Villenave-d’Ornon), La decouverte (VAL-DU-FABY), la SCIC gens de la fontaine, location d’espaces d’activité (Rostrenen), la SCOP « CARTE BLANCHE » cantine artisanale en circuits courts à Chaucenne (25), SARL Le Pain De La Semaine – L’Atelier de Boulangerie de Restalgon (Le Faouët), SARL La Moulinette –café, restaurant, bar et lieu culturel (Lille), Restaurant LA TABLE DE MORVAN (Gourin), la SCOP Les Fournils des Lacs (BOURG- LES-VALENCE), la SCOP Brasserie Sylvatica (COUNOZOULS), La Paysanne de l’Artois – Ferme – Brasserie – Malterie (Gavrelle), Scea La Ferme Bio Du Resto(Ploemeur), Agri Bio Conseil- Négoce agricole spécialisé en agriculture biologique (Bain- de-Bretagne), le pain levé SCOP boulangère – pain 100 % bio sur levain naturel (Courcy), SALDAC importateur de commerce équitable de produits alimentaires du Pérou (Montélimar), Le Verger de la Reinette- produits pur jus à base de pommes (Préaux du Perche), Le Fournil Bio (Villeneuve D’Ascq),Ty Vrac – épicerie vrac (Trégunc), Du chemin au jardin– Ferme maraîchère(Gourin), Un Autre Chemin – réseau 5 magasins bio (Haut de France), El’Cagette- groupement d’achat (Roubaix), Le Jardin des Thorains, ferme agricole, semences paysannes (Lavau), ABC BIO – magasin Bio (MARLY), SCOP – BIOMONDE VAL DE SCARPE – magasin bio (SAINT LAURENT BLANGY), Autrement bio – Biomonde – magasin bio (Bailleu), magasin BIO M’ BIOMONDE (Chauny), We Vrac – L’épicerie responsable (Brunoy),Croc la Vie – cuisine et livre des repas frais 100% BIO exclusivement aux structures d’accueil Petite Enfance (Hauts-de-France), La Vie Claire – Magasin bio – (Plouhinec), Café Participatif Bois Blancs (Lille),Couleur Vrac, épicerie bio (Créteil)
Potj’ Café SARL, Torréfacteur de café et orge bio
(Godewaersvelde), Le Tendre – restaurant (lille),
l’atelier du sel – Paludiers Indépendants
Producteurs-Récoltants associés en G.A.E.C familial
((Saint Molf / Guérande), Épicerie indépendante
(Saint-Ouen), Le Jardin du Bout du Monde,
Pépinière (Plonéour-Lanvern), SCIC Scarabée
BIOCOOP (Rennes),
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Sur le sujet, retrouvez l’interview sur Radiobalises d’Emmanuel Antoine (Minga) et de Mikaël Coroller (Biocoop 7 épis) La Bio en crise ?
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Et pour mémoire sur le sujet, retrouvez le Communiqué de presse publié le 9 janvier dernier par le Collectif de Soutien aux Victimes des Pesticides de l’Ouest : CP du CSVPO : Crise du bio : sortir du silence
Elle a immédiatement fait appel.
Rendez vous donc devant la Cour d’Appel de Rennes !!!
Et, pour les mêmes faits, de refus de prélèvement d’ADN, 6 Fauchereuses breton.ne.s sont convoqués devant le tribunal de St Brieuc le 30 mars 2023 à 14 h Donc Rendez vous le 30 mars 2023 à 14 h devant le tribunal de St Brieuc !!!
Madame Bahuon, vice-procureure de la République convoque notre Kamarade pour les faits suivants :
-refus de se soumettre à un prélèvement biologique
-refus de se soumettre aux opérations de relevés signalétiques , notamment empreintes digitales, palmaires ou des photographies nécessaires à l’alimentation […] des fichiers de police.
Les procureurs s’entêtent à convoquer des militant.e.s pour prélèvement ADN, malgré le fait que la France ait été condamnée par la CEDH en 2017 et à maintes reprises pour fichage génétique d’un manifestant : lire ci dessous
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Pour mémoire :
Fichage génétique: la France défie la jurisprudence européenne
Au mois de juin dernier, la Cour européenne des droits de l’homme a condamné la France pour avoir voulu inscrire un manifestant au fichier national des empreintes génétiques, le FNAEG. Trois mois plus tard, la police continue à exiger des prélèvements et le parquet à poursuivre les récalcitrants. Yvan Gradis, militant antipublicitaire, comparaissait vendredi.
Le procès d’Yvan Gradis pour refus de prélèvement d’ADN s’annonçait comme l’événement de la journée d’audiences de la 10e chambre correctionnelle du TGI de Paris, vendredi 6 octobre. Sa vingtaine de soutiens ayant fait le déplacement avaient patienté tout l’après-midi pour voir finalement comparaître, en fin de journée, le militant antipublicitaire et apôtre de la désobéissance civile.
Yvan Gradis ne les a pas déçus. « Je dois vous dire la vérité qui est simple : je suis un barbouilleur non violent. Et je trouve monstrueux que l’on demande mon ADN, a-t-il lancé aux trois magistrates en introduction. Je suis un citoyen qui a des tripes et une conscience morale. Je suis prêt à affronter les sanctions que je mérite. » Le ton de l’audience était donné. Après une rixe dans un hôtel de luxe et quelques petites affaires de cannabis, la 10e chambre correctionnelle se trouvait, pour sa dernière audience de la journée, face à un dossier politique.
L’accusé n’est d’ailleurs pas un inconnu des tribunaux. À 59 ans, il a même un long passé de militant antipublicitaire l’ayant conduit plus d’une fois devant la justice. Yvan Gradis explique être entré « en publiphobie et en boycottage de la publicité » dès l’âge de 23 ans, en 1981. Au fil des années, son engagement prend une forme plus concrète. En 1990, il crée la lettre d’information Le Publiphobe et, deux ans plus tard, il cofonde l’association Résistance à l’agression publicitaire (RAP) dont il prend la présidence.
Durant ces années, Yvan Gradis et son association luttent contre l’invasion publicitaire de l’espace public par les voies légales, en demandant le décrochage de panneaux d’affichage devant les tribunaux. Mais cette stratégie montre ses limites. En 2000, il décide de passer à l’action et d’entrer en désobéissance civile. Il publie un manifeste, Vers la légitime réponse, appelant au « barbouillage » des panneaux publicitaires.
Dans les deux années qui suivent, pas moins de quinze opérations sont menées. Yvan Gradis insiste sur le caractère « pacifique et non-violent » de ces actions. Lorsqu’ils sont interpellés, les militants mettent un point d’honneur à ne pas résister et à respecter les forces de l’ordre. Entre ses activités professionnelles d’écrivain, acteur et correcteur, Yvan Gradis a participé en 17 ans à plusieurs dizaines de barbouillages, notamment au sein du Collectif des déboulonneurs.
Ces actions l’ont conduit de nombreuses fois au poste, une fois en garde à vue (20 heures) et, parfois, devant le tribunal correctionnel où il a le plus souvent été condamné à des peines symboliques. À quelques occasions, même, les juges l’ont relaxé, comme le 2 avril 2010 alors qu’il comparaissait avec un autre militant pour un barbouillage sur les Champs-Élysées en 2008. Mais le parquet fait appel et, le 26 juin 2012, les deux barbouilleurs sont condamnés à une amende de 200 euros. L’année suivante, Yvan Gradis est convoqué par la police pour un prélèvement de son ADN en vue de son inscription au fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG). Mais, alors en voyage, il pose un lapin aux policiers et, pendant deux ans, n’entend plus parler d’eux.
En mai 2015, pourtant, Yvan Gradis est à nouveau convoqué au commissariat. Il répond cette fois à la convocation, mais refuse de donner son ADN. Les policiers l’informent alors qu’il sera poursuivi devant le tribunal correctionnel, où il risquera jusqu’à un an de prison et 15 000 euros d’amende. La justice semble une nouvelle fois oublier le militant, qui n’entend plus parler de l’affaire pendant deux autres années. Le 31 août 2017, les policiers le font venir une troisième fois. Cette fois, Yvan Gradis repart avec une convocation pour un procès.
À l’audience, l’accusé était venu avec, outre son comité de soutien, deux témoignages écrits de poids : l’un signé par Edgard Morin et l’autre par Jean-Claude Ameisen, président d’honneur du Comité consultatif national d’éthique. Ce dernier avait rendu, en avril 2007, un avis qui dénonçait déjà à l’époque le fichage génétique pratiqué en France. Cela fait en réalité de nombreuses années que le FNAEG est la cible de critiques, et l’acte de désobéissance civile d’Yvan Gradis est loin d’être un cas isolé.
Le FNAEG a été à l’origine créé en 1998, dans une France traumatisée par les révélations sur le tueur en série Guy Georges, dans le but d’y inscrire les personnes mises en cause ou condamnées pour des crimes et délits sexuels. Mais il a très vite connu un élargissement considérable de son champ d’application. En 2001 notamment, la loi sur la sécurité quotidienne du ministre de l’intérieur socialiste Daniel Vaillant l’étend aux crimes d’atteinte volontaire à la vie, aux actes de torture, au terrorisme, aux violences volontaires… En 2003, la loi sur la sécurité intérieure de Nicolas Sarkozy y ajoute une nouvelle liste de délits, comme les dégradations ou les outrages à agent.
Ces élargissements successifs ont logiquement fait exploser le nombre de personnes fichées génétiquement, notamment en intégrant les militants interpellés lors de manifestations via les infractions de dégradation et d’outrage à agent. Elles sont passées de quelques milliers d’inscriptions au début des années 2000 à 127 814 en 2005, avant de dépasser la barre du million en 2009. En 2011, ce sont 2 005 885 personnes qui étaient fichées. Un nouveau cap a été franchi en 2015, avec 3 006 991 inscriptions. Et les conflits sociaux de l’année 2016 n’ont pu que faire gonfler encore le FNAEG de manière significative.
Au fil des années, de nombreux syndicalistes, manifestants ou faucheurs volontaires d’OGM ont été inscrits au FNAEG. Beaucoup d’entre eux ont, comme Yvan Gradis, refusé le prélèvement et ont tenté de contester leur condamnation avec des succès divers. Saisi par une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) déposée par des faucheurs d’OGM, le Conseil constitutionnel avait validé, dans une décision rendue le 16 septembre 2010, le principe du fichier, mais en émettant certaines réserves. Les Sages soulignaient notamment que le dispositif légal encadrant le FNAEG était encore, en l’état, incomplet.
L’article 706-54 du code pénal régissant l’inscription au fichier stipule en effet : « Un décret en Conseil d’État pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés détermine les modalités d’application du présent article. Ce décret précise notamment la durée de conservation des informations enregistrées. »
Or ce décret n’a jamais été pris. Par défaut, c’est donc une durée maximale de quarante ans de stockage, prévue par l’article R53-14 du code de procédure pénale, qui s’applique quelle que soit l’infraction, pour le tueur en série comme pour le militant interpellé lors d’une manifestation. Le Conseil constitutionnel rappelait donc, dans sa décision, la nécessité « de proportionner la durée de conservation de ces données personnelles, compte tenu de l’objet du fichier, à la nature ou à la gravité des infractions concernées ».
Sept années plus tard, ce décret n’a toujours pas été pris. Contacté par Mediapart, le ministère de l’intérieur indique que le texte est toujours en cours d’élaboration. Le sujet, précise-t-il, a été « pris en compte » et « le décret devrait être prêt dans les semaines à venir ». Il y a pourtant urgence car le FNAEG est, depuis l’été dernier, officiellement en infraction avec les textes européens.
Le 22 juin 2017, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a en effet condamné la France après avoir été saisie par un manifestant condamné en 2009 pour refus de prélèvement d’ADN.
En l’espèce, le plaignant était Jean-Michel Ayçaguer, un agriculteur basque de la ville d’Ossès, interpellé pour avoir donné des coups de parapluie en direction des CRS lors d’une manifestation émaillée d’accrochages avec les forces de l’ordre en 2008.
Dans sa décision, la CEDH rappelait les critiques émises en 2010 par le Conseil constitutionnel sur l’absence de décret et soulignait « qu’aucune différenciation n’est actuellement prévue en fonction de la nature et de la gravité de l’infraction commise, malgré l’importante disparité des situations susceptibles de se présenter, comme celle de M. Ayçaguer en atteste. Or, poursuivaient les magistrats, les agissements de celui-ci s’inscrivaient dans un contexte politique et syndical, et concernaient de simples coups de parapluie en direction de gendarmes ». En résumé, la CEDH estimait que des violences commises lors d’un mouvement social ne pouvaient être mises sur le même plan que « d’autres infractions particulièrement graves, à l’instar des infractions sexuelles, du terrorisme ou encore des crimes contre l’humanité ou la traite des êtres humains ».
En conclusion, la CEDH jugeait que le FNAEG violait l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme protégeant la vie privée et condamnait la France à verser à l’agriculteur 3 000 euros de dommages et intérêts, ainsi que 3 000 euros pour frais et dépens. Selon eux, la condamnation de Jean-Michel Ayçaguer « s’analyse en une atteinte disproportionnée au respect de sa vie privée et ne peut passer pour nécessaire dans une société démocratique ».
Cette condamnation est pourtant totalement ignorée des autorités françaises, comme le montrent le cas d’Yvan Gradis, convoqué par la police au mois d’août, mais également celui de Candice Marchal qui, elle, a fait six heures de garde à vue le 13 septembre dernier pour les mêmes faits. Cette journaliste pensait pourtant en avoir fini avec la justice. En 2010, Candice Marchal avait été impliquée dans une sombre affaire d’espionnage, qui avait secoué l’Audiovisuel extérieur de la France (AEF).
Il a fallu six années pour que l’affaire soit jugée et Candice Marchal condamnée pour vol de documents, à une peine de prison avec sursis et à une amende symbolique d’un euro. La journaliste avait repéré dans l’actualité la condamnation de la France par la CEDH, au mois de juin dernier. Lorsqu’elle est convoquée pour son prélèvement d’ADN, elle se rend au commissariat, la décision de la Cour à la main. Mais rien n’y fait. Devant son refus, les policiers appellent le parquet qui ordonne son placement en garde à vue. Elle ne sera libérée que six heures plus tard.
Comment expliquer que, après sa condamnation par la CEDH et en l’absence de décret, la France n’ait pas cessé de poursuivre les personnes refusant de donner leur ADN ? Contacté par Mediapart, le ministère de la justice n’a pas donné suite à nos questions. « La Direction des affaires criminelles et des grâces aurait pu faire une note, estime Alain Mikowski, avocat de Candice Marchal. L’arrêt de la CEDH est pourtant très clair, et il y avait eu des signes avant-coureurs avec la décision du Conseil constitutionnel de 2010. »« À l’origine, le FNAEG partait d’un bon esprit, poursuit Me Mikowski, mais aujourd’hui nous sommes face à un fichage généralisé de la population. En quoi peut-il être utile pour la justice de prendre l’ADN de quelqu’un comme Candice ? Si ce n’est pour effectuer un fichage génétique le plus large possible de la population, pour avoir les mailles du filet les plus fines possibles. »
L’avocat d’Yvan Gradis, Vincent Brengarth, n’a pas non plus manqué de rappeler aux juges la décision de la CEDH dans sa plaidoirie. « Si Yvan Gradis entre dans le fichier, il n’en ressortira pas avant les années 2050 », a-t-il souligné. Et s’il est condamné, cela signifie que l’on « s’assied littéralement sur l’arrêt rendu par la CEDH », a plaidé Me Brengarth. « On voit bien que l’affaire n’est pas si simple », a souligné l’avocat, avant de rappeler que l’article 55 de la Constitution française stipulait que « les traités ou accords régulièrement ratifiés », et donc la Convention européenne des droits de l’homme, ont « une autorité supérieure à celle des lois ».
Dénonçant le risque d’une « République du fichage perpétuel » et soulignant « l’intérêt général » que constitue l’engagement de son client « contre la résistance à cette agression publicitaire qui est devenue la norme », Me Brengarth a demandé sa relaxe. Dans son réquisitoire, le parquet n’a quant à lui aucunement évoqué l’arrêt de la CEDH et s’est contenté d’un rappel de la loi française. Il a cependant reconnu le caractère particulier des actions d’Yvan Gradis en demandant que son éventuelle condamnation soit accompagnée d’une dispense de peine. Le tribunal rendra sa décision le 3 novembre.
Candice Marchal, de son côté, comparaîtra le 10 octobre dans cette même 10e chambre correctionnelle du TGI de Paris. Comme Yvan Gradis, elle se dit déterminée à ne pas céder, quitte à être condamnée. « S’il le faut, j’irai jusqu’à la CEDH. C’est une question de principe », explique-t-elle. « Ce n’est pas parce que je suis journaliste. J’ai totalement conscience que beaucoup de personnes ne peuvent pas se permettre de refuser le prélèvement d’ADN et cèdent car cela signifie un nouveau procès, prendre un avocat… Moi-même, cela ne me fait pas plaisir, poursuit-elle, mais c’est justement pour cela qu’il faut que ceux qui peuvent contester le fassent. Il faut qu’un maximum de personnes refuse ce fichage généralisé. Et j’irai jusqu’au bout. »
JUIN 2017 : la France condamnée par la CEDH pour fichage génétique
La justice européenne a adressé, jeudi 22 juin, un sérieux avertissement à la France. Le jour même où Emmanuel Macron annonçait vouloir modifier notre législation afin de faciliter les croisements de fichiers, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a jugé contraire aux textes européens le Fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG) et condamné la France pour « atteinte disproportionnée » à la vie privée.
Les juges européens avaient été saisis par Jean-Michel Ayçaguer, un agriculteur basque de la ville d’Ossès, condamné en 2009 pour avoir refusé un prélèvement génétique en vue de son inscription au FNAEG. Cette condamnation faisait suite à une manifestation organisée le 17 janvier 2008 à Ainharp par le syndicat agricole Euskal Erriko Laborarien Batasuna et le Groupement foncier agricole mutuel Lurra. Dans un contexte particulièrement tendu, le rassemblement s’était terminé par quelques accrochages avec les forces de l’ordre.
Jean-Michel Ayçaguer avait été interpellé pour avoir été vu donnant des coups de parapluie en direction de gendarmes. Placé en garde à vue, il avait été condamné dans la foulée à deux mois de prison avec sursis pour « violences avec arme sur une personne dépositaire de l’autorité publique ». Au mois de décembre 2008, l’agriculteur était à nouveau convoqué, mais cette fois pour un prélèvement génétique en vue de son inscription au FNAEG. Face à son refus, le tribunal de grande instance de Bayonne l’avait condamné à une amende de 500 euros.
La CEDH a donc estimé que cette condamnation était contraire à l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme protégeant la vie privée et a condamné la France à verser à l’agriculteur 3 000 euros de dommages et intérêts, ainsi que 3 000 euros pour frais et dépens. Mais surtout, les juges européens ont condamné en des termes très fermes le FNAEG tel qu’il est actuellement géré par la France. Selon eux, la condamnation de Jean-Michel Ayçaguer « s’analyse en une atteinte disproportionnée au respect de sa vie privée et ne peut passer pour nécessaire dans une société démocratique ».
Il s’agit là d’une importante victoire pour les défenseurs des droits de l’homme, militants, syndicalistes… qui, depuis des années, dénoncent les détournements du FNAEG à des fins de répression sociale. Ce fichier avait été à l’origine créé en 1998 dans le but d’y inscrire les personnes mises en cause ou condamnées pour des crimes et délits sexuels. Mais, il a très vite connu une élargissement considérable de son champ d’application. En 2001 notamment, la loi sur la sécurité quotidienne présentée par le ministre de l’intérieur socialiste Daniel Vaillant l’étend aux crimes d’atteintes volontaires à la vie, aux actes de torture, au terrorisme, aux violences volontaires… En 2003, la loi sur la sécurité intérieure de Nicolas Sarkozy y ajoute une nouvelle liste de délits, comme les dégradations ou les outrages à agent.
Avec l’expansion constante des crimes et délits concernés, la croissance du nombre de personnes inscrites au FNAEG a été exponentielle. Elles sont par exemple passées de 2 807 en 2003 à 330 000 en 2006. Selon la CNIL, le fichier contenait, au 1er septembre 2013, 2 547 499 profils génétiques, dont 1,9 millions de personnes mises en cause, 430 298 personnes condamnées et 149 097 traces non identifiées.
Mais surtout, le FNAEG est critiqué pour son application à de nombreux militants. Les rassemblements et manifestations sont souvent l’occasion, en effet, d’affrontements avec les forces de l’ordre ou de dégradations. Autant de délits permettant une inscription au fichier. Au fil des années, de nombreux syndicalistes, manifestants ou faucheurs volontaires d’OGM ont ainsi été inscrits au FNAEG. Beaucoup d’entre eux ont, comme Jean-Michel Ayçaguer, refusé le prélèvement et ont tenté de contester leur condamnation.
Saisi par des faucheurs d’OGM, le Conseil constitutionnel avait validé, dans une décision rendue le 16 septembre 2010, le principe du fichier, mais en émettant certaines réserves. Les Sages soulignaient notamment la nécessité « de proportionner la durée de conservation de ces données personnelles, compte tenu de l’objet du fichier, à la nature ou à la gravité des infractions concernées ». C’est justement sur ce point que se base la CEDH pour condamner la France. Les juges européens soulignent en effet que l’article R. 53-14 du code de procédure pénale régissant la conservation des données ne prévoit qu’une durée globale de 40 ans, sans tenir compte de la gravité des faits.
La Cour européenne relève « qu’aucune différenciation n’est actuellement prévue en fonction de la nature et de la gravité de l’infraction commise, malgré l’importante disparité des situations susceptibles de se présenter, comme celle de M. Ayçaguer en atteste. Or, poursuivent les magistrats, les agissements de celui-ci s’inscrivaient dans un contexte politique et syndical, et concernaient de simples coups de parapluie en direction de gendarmes ». En résumé, la CEDH estime que des violences commises lors d’un mouvement social ne peuvent être mises sur le même plan que « d’autres infractions particulièrement graves, à l’instar des infractions sexuelles, du terrorisme ou encore des crimes contre l’humanité ou la traite des êtres humains ».
Le Syndicat de la magistrature s’est félicité, dans un communiqué, de cette décision et a appelé à « une réforme profonde du fichage génétique : restriction aux seules personnes condamnées, limitation des infractions visées, rétablissement d’une autorisation judiciaire préalable, réduction de la durée de conservation et ouverture de possibilité d’effacement effectives. Afin d’effacer l’empreinte indélébile que ce fichage massif laisse sur nos droits ».
Le 10 novembre 2021, une centaine de faucheurs et faucheuses volontaires d’OGM venu.e.s de toute la France ont mené une inspection citoyenne visant à vérifier la présence de semences de tournesols et de colza VrTH à Calmont ( Aveyron) dans les locaux de la RAGT.
Ces semences relèvent, selon la Cour de justice de l’Union européenne et le Conseil d’État français de la réglementation sur les OGM, mais à ce jour cette réglementation n’est toujours pas appliquée. Ces OGM sont semés dans les champs.
51 faucheurs volontaires comparaîtront donc devant le tribunal judiciaire de Rodez, plus un journaliste de Reporterre, Grégoire Souchay.
Ce dernier est poursuivi pour les mêmes faits que le collectif à savoir la destruction de sacs de semences de tournesol et de colza OGM et vol de propriétés industrielles.
Grégoire Souchay n’est pas faucheur volontaire et ne faisait que son métier, informer les lecteurs sur une action citoyenne non violente. Nous tenons à rappeler que la liberté de la presse est une donnée non-négociable de notre démocratie et que sa mise en cause dans cette affaire en est une spoliation.
Depuis près de vingt ans, nous luttons contre l’artificialisation du vivant et c’est la première fois qu’un journaliste est inquiété pour avoir couvert une de nos actions. Les violations de l’État de droit deviennent de plus en plus fréquentes de la part du gouvernement.
Cette poursuite devant un tribunal d’un journaliste ne faisant que son travail en est une illustration supplémentaire comme l’est le non respect par le gouvernement de la décision de la Cour de justice Européenne ou celle du Conseil d’État que dénonçaient les Faucheuses et les Faucheurs d’OGM, le 10 novembre 2021.
Nous, faucheurs et faucheuses volontaires continuerons à lutter pour le respect de tout le vivant, et pour une alimentation saine .
Nous serons toujours aux côtés de ceux et celles qui portent cette parole.
Nous affirmons notre soutien à tous les journalistes faisant librement leur travail et qui seraient attaqués pour l’usage de cette liberté.
La régularisation est proche pour la porcherie de Landunvez
Publié par Yann Le Gall le 04 novembre 2022 à 12h18 Réunis devant la préfecture du Finistère, ce vendredi, des membres des collectifs Stoppons l’extension d’Avel Vor, et Extinction rébellion n’ont pas réussi à convaincre ceux du Coderst. Ces derniers ont donné un avis favorable à la régularisation d’extension d’un élevage porcin à Landunvez. (Photo Le Télégramme/Yann Le Gall)
Un nouvel avis positif a été émis, ce vendredi matin, 4 novembre, à la préfecture. La régularisation de l’extension d’une porcherie de Landunvez n’attend plus que le paraphe du préfet. Les opposants restent mobilisés.
Réunis ce vendredi 4 novembre 2022, les membres du Coderst (Conseil départemental de l’environnement et des risques sanitaires et technologiques) ont examiné la demande de régularisation de l’extension de l’élevage porcin Avel Vor, à Landunvez. Les représentants des directions territoriales, de la chambre d’agriculture, de l’Agence régionale de santé, du Sdis 29 ou, encore, des élus départementaux et communautaires du pays d’Iroise ont apporté quinze voix favorables. Seules les trois associations représentantes des usagers (CLCV, Eau et rivières de Bretagne, pêcheurs de l’AAPPMA) ont voté contre.
27 000 porcs charcutiers par an
À la suite de ce nouvel avis positif (en écho à celui déjà émis par le commissaire enquêteur), le préfet du Finistère, Philippe Mahé, devrait prochainement signer un arrêté autorisant le dirigeant de la SARL Avel Vor, Philippe Bizien, à poursuivre l’élevage porcin de 11 730 animaux équivalents et à produire jusqu’à 27 000 porcs charcutiers par an.
Une capacité calibrée par des travaux d’agrandissement et de modernisation de ses installations (y compris de traitement du lisier) de Kerizinic et de Kerincuff, exécutés en 2017, à la suite d’un premier arrêté préfectoral, favorable à cette extension, acté en 2016.
« Mascarade »
Le tribunal administratif de Rennes avait annulé cet arrêté en 2019, au motif d’une étude d’impact insuffisante. Annulation confirmée par la cour administrative d’appel de Nantes. Mis en demeure par le préfet, l’exploitant a donc enclenché une procédure de demande de régularisation de son extension.
« Ce Coderst est une mascarade. Si le préfet signe un nouvel avis favorable, il piétine la justice administrative », a répété la Renanaise Armelle Jaouen, aux côtés d’une poignée de représentants du collectif citoyen « Stoppons l’extension d’Avel Vor », réunis devant les portes de la préfecture de Quimper, entre lesquelles s’engouffraient les membres du Coderst.
« Nous en avons besoin »
Certains ont pris le temps de répondre à l’invitation à la discussion des opposants. « Son élevage est aux normes. Nous en avons besoin pour nourrir la planète », a objecté la conseillère départementale Marie-Christine Lainez, élue et agricultrice dans la commune mitoyenne de Plourin.
Des échanges cordiaux entre membres du collectif Stoppons l’extension d’Avel Vor et du Coderst se sont improvisés devant la préfecture. Sans qu’ils ne changent les avis. (Le Télégramme/Yann Le Gall)
Plainte contre X
Pas convaincus, les membres du collectif ont déjà averti qu’ils déposeraient un recours administratif contre l’arrêté de régularisation du préfet. Ils ont aussi l’intention de porter une plainte collective contre X, au pénal, « pour mise en danger de la vie d’autrui. En cas de pollution de l’environnement par cette installation, ceux qui l’ont autorisée seraient mis face à leur responsabilité ».
Cette procédure de régularisation amène également quelques réflexions de la part du député finistérien Jean-Charles Larsonneur (Brest) : « Elle autoriserait un élevage de 12 000 porcs sans tenir compte de la densité de cette activité dans le secteur. 4 000 porcs par km² de surface agricole utile, cela a inévitablement un impact sur l’écosystème fragile du pays d’Iroise ».
Le député Larsonneur : « La composition du Coderst m’interpelle »
Le membre de la majorité gouvernementale préférerait que la loi fasse passer l’étude d’impact de toute nouvelle installation à l’échelle d’un territoire. De même, il souhaite l’évolution de la gouvernance sur ces dossiers sensibles : « La composition du Coderst m’interpelle. Quand on est élu, proche d’un exploitant à la tête d’un groupement porcin, membre d’un comité de l’eau… On est juge et partie. Il faut retravailler cette composition, si nous voulons que le grand public n’ait pas de doute vis-à-vis de cette instance ».
Enfin, s’il se félicite de l’imposition de normes qui ont permis de réels progrès dans les exploitations et « garde confiance dans l’État », Jean-Charles Larsonneur souhaiterait que leurs contrôles, surtout basés sur le déclaratif, « soient musclés ».
Méga porcherie des 12 000 cochons. Vers une régularisation par la préfecture du Finistère ?
Publié le 29/10/2022 à 12h28 • Mis à jour le 29/10/2022 à 14h46
La ferme aux 12 000 cochons de Landunvez dans le Finistère sera-t-elle régularisée par le préfet ? Retoquée deux fois en justice, l’extension d’une « mégaporcherie » dans le Finistère suscite une forte opposition des riverains qui dénoncent odeurs de lisier, pollution de l’air et des plages.
« Pour une agriculture à taille humaine », proclame une grande pancarte, posée au bout de la route touristique de Landunvez, petite commune du Nord Finistère connue pour sa magnifique côte sauvage.
Agglutinés autour des deux tables de camping, les promeneurs se penchent pour signer une plainte collective tandis qu’un verre de « soupe paysanne » leur est servi par un militant.
A cause des odeurs, on doit rentrer nos draps qui sèchent. Sinon, on dort dans le caca !
Christine Douillard
Riveraine
« Cet été, on n’a pas pu se baigner avec mes petits enfants car la plage était fermée. C’est quand même désagréable », se désole Christine Douillard, retraitée de 70 ans, qui habite un lotissement au milieu des champs de maïs, où le lisier des porcs est épandu.
« A cause des odeurs, on doit rentrer nos draps qui sèchent. Sinon, on dort dans le caca ! », lâche-t-elle. « On n’est pas contre le cochon, précise son mari Roland Douillard, 71 ans, barbe blanche et bonnet noir. Mais le problème, c’est l’excès de cochons ! »
Dans leur viseur : la « mégaporcherie » Avel Vor (« vent de la mer » en breton), dont les grands silos bleus sont visibles du bourg de Landunvez, à moins de 300 mètres de là.
L’affaire divise la commune bretonne depuis qu’en 2015, le gérant Philippe Bizien a demandé à agrandir son exploitation pour passer à 12 000 porcs (une exploitation moyenne en compte 1 400 environ).
Une enquête publique est donc lancée mais le commissaire-enquêteur émet un avis défavorable à cette extension en évoquant les « nombreuses nuisances » ressenties par les riverains.
Une première autorisation attaquée
Faisant fi de cet avis, le préfet du Finistère autorise cependant l’éleveur à agrandir ses installations en avril 2016, ce que ce dernier fait dans la foulée.
C’est alors que l’affaire est portée en justice par plusieurs associations, dont Eau et Rivières de Bretagne, qui attaquent l’arrêté pour s’opposer à cette « mégaporcherie ».
Plages fermées, eau dégradée, pollution de l’air : les émanations du lisier de porc risquent, selon ces opposants, de s’ajouter à celles des élevages voisins, dégradant encore un peu plus l’environnement de la commune d’à peine 1 500 habitants.
3 000 porcs au km²
Car dans ce pays du Léon, le cochon est roi : la production dépasse par endroit 3 000 porcs au km² dans une région, la Bretagne, qui se place en sixième position européenne pour la taille de son cheptel porcin.
Avec 7,3 millions de cochons en 2021, la péninsule bretonne compte plus de la moitié du cheptel français sur seulement 5% du territoire de l’Hexagone. On compte ainsi plus de deux cochons par Breton.
« A Landunvez, on est plutôt à 10 cochons par habitant », rectifie Laurent Le Berre, président de l’Association pour la protection de la côte des légendes (APPCL).
Les opposants obtiennent gain de cause trop tard
En mai 2019 et novembre 2021, les opposants obtiennent gain de cause devant la justice administrative. Mais la porcherie est déjà agrandie et produit 27 000 porcs charcutiers par an, en vertu d’une autorisation préfectorale provisoire.
Pour régulariser la situation, une nouvelle enquête publique, menée au printemps 2022, a cette fois conclu à un avis favorable, malgré les mises en garde de l’Autorité environnementale sur les « émissions d’ammoniac globalement très élevées » des différents élevages du territoire qui contribuent à « la dégradation de la qualité de l’air par la formation de particules fines ».
Débat idéologique selon la FDSEA
Le Conseil départemental de l’environnement et des risques sanitaires et technologiques (Coderst) doit désormais se pencher sur le dossier avant que la décision finale ne revienne au préfet.
« Le dossier d’extension coche toutes les cases des réglementations en vigueur », estime Jean-Alain Divanac’h, éleveur de porcs et président de la FDSEA du Finistère, en dénonçant un « débat idéologique. « Les opposants ne peuvent pas démontrer que les pollutions viennent de l’élevage Avel Vor », pointe-t-il.
Laurent Le Berre, lui, promet de nouveaux recours en cas de régularisation de l’exploitation. « Ça peut encore durer 10 ans ! », lance-t-il.
Contactés par l’AFP, la préfecture et M. Bizien n’ont pas souhaité s’exprimer dans l’immédiat.
Finistère. Porcherie de Landunvez : le collectif Stoppons l’extension rassemblé à Quimper
Vendredi 4 novembre 2022, des membres du collectif Stoppons l’extension étaient rassemblés devant la préfecture, à Quimper (Finistère). Ils se mobilisent contre la régularisation de l’extension de la porcherie Avel Vor, à Landunvez, près de Brest.
Des membres du collectif Stoppons l’extension étaient rassemblés à Quimper (Finistère) vendredi 4 novembre 2022, devant la préfecture. | OUEST-FRANCE
Les cercueils de la « santé » et de « l’eau » encadrent la porte d’entrée de la préfecture, à Quimper (Finistère), vendredi matin 4 novembre 2022. Ils ont été apportés par une dizaine de membres du collectif Stoppons l’extension, venu tout droit de Landunvez et Porspoder, près de Brest.
« On est là parce qu’aujourd’hui se tient la commission d’évaluation des risques environnementaux et sanitaires, résume Armelle Jaouen, membre du collectif. Le préfet a proposé un arrêté de régularisation d’une extension porcine à Landunvez et Porspoder qui devrait être validé aujourd’hui. »
Le collectif se compose de citoyens et de trois associations : AEPI (Avenir et environnement en Pays d’Iroise), Eaux et rivières de Bretagne et l’APPCL (l’Association pour la protection de la Côte des Légendes).
Plainte contre X
La « mégaporcherie » Avel Vor est située dans la commune de Landunvez (Finistère). | OUEST-FRANCE
Pour rappel, en 2016, cette porcherie Avel Vor serait passée de 9 000 à 12 000 porcs. L’extension est combattue par des associations environnementales depuis sept ans. Alors que deux décisions de justice se sont montrées défavorables, une deuxième enquête publique, réalisée en mai 2022, a donné un avis favorable à la régularisation. La décision finale revient au préfet.
Si validation il y a, le collectif devrait déposer un recours devant le tribunal administratif. Dans le courant du mois de novembre, il déposera également plainte contre X pour « mise en danger de la vie d’autrui ».
Stoppons l’extension poursuit en parallèle une campagne d’information. Le prochain rendez-vous est donné dimanche 6 novembre, à Lanildut sur la plage du crapaud, à 15 h.
Minihy-Tréguier. L’agrandissement de l’élevage porcin retoqué par la justice
La cour d’appel de Nantes (Loire-Atlantique) a annulé l’arrêté préfectoral d’extension d’une porcherie industrielle, à Minihy-Tréguier (Côtes-d’Armor), mardi 18 octobre 2022. Une décision que salue l’association Eau et Rivières de Bretagne.
L’arrêté préfectoral permettant à l’élevage de doubler sa capacité d’accueil a été annulé par le tribunal administratif de Nantes. | ARCHIVES OUEST-FRANCE / MARC OLLIVIER
Ouest-France Victor GUILLAUD-LUCET. Publié le 19/10/2022 à 15h05
Le feuilleton judiciaire de l’extension de l’élevage porcin de Minihy-Tréguier (Côtes-d’Armor) se poursuit. Mardi 18 octobre 2022, le tribunal administratif de Nantes (Loire-Atlantique) a rendu en appel une décision annulant l’arrêté préfectoral qui avait été accordé à la SCEA de Kerfos, en novembre 2017. Cet arrêté permettait à l’éleveur de doubler son nombre de bêtes, passant de 3 700 à près de 7 100 cochons.
Des plafonds d’azote dépassés
Le 30 septembre 2022, le rapporteur public préconisait aux juges l’annulation de cet arrêté. Le magistrat indépendant avait étayé sa position en démontrant que le plan d’épandage de l’élevage n’était pas suffisamment vaste pour accueillir les effluents issus d…
Au mois de juin dernier, la Cour européenne des droits de l’homme a condamné la France pour avoir voulu inscrire un manifestant au fichier national des empreintes génétiques, le FNAEG. Trois mois plus tard, la police continue à exiger des prélèvements et le parquet à poursuivre les récalcitrants. Yvan Gradis, militant antipublicitaire, comparaissait vendredi.
Le procès d’Yvan Gradis pour refus de prélèvement d’ADN s’annonçait comme l’événement de la journée d’audiences de la 10e chambre correctionnelle du TGI de Paris, vendredi 6 octobre. Sa vingtaine de soutiens ayant fait le déplacement avaient patienté tout l’après-midi pour voir finalement comparaître, en fin de journée, le militant antipublicitaire et apôtre de la désobéissance civile.
Yvan Gradis ne les a pas déçus. « Je dois vous dire la vérité qui est simple : je suis un barbouilleur non violent. Et je trouve monstrueux que l’on demande mon ADN, a-t-il lancé aux trois magistrates en introduction. Je suis un citoyen qui a des tripes et une conscience morale. Je suis prêt à affronter les sanctions que je mérite. » Le ton de l’audience était donné. Après une rixe dans un hôtel de luxe et quelques petites affaires de cannabis, la 10e chambre correctionnelle se trouvait, pour sa dernière audience de la journée, face à un dossier politique.
L’accusé n’est d’ailleurs pas un inconnu des tribunaux. À 59 ans, il a même un long passé de militant antipublicitaire l’ayant conduit plus d’une fois devant la justice. Yvan Gradis explique être entré « en publiphobie et en boycottage de la publicité » dès l’âge de 23 ans, en 1981. Au fil des années, son engagement prend une forme plus concrète. En 1990, il crée la lettre d’information Le Publiphobe et, deux ans plus tard, il cofonde l’association Résistance à l’agression publicitaire (RAP) dont il prend la présidence.
Durant ces années, Yvan Gradis et son association luttent contre l’invasion publicitaire de l’espace public par les voies légales, en demandant le décrochage de panneaux d’affichage devant les tribunaux. Mais cette stratégie montre ses limites. En 2000, il décide de passer à l’action et d’entrer en désobéissance civile. Il publie un manifeste, Vers la légitime réponse, appelant au « barbouillage » des panneaux publicitaires.
Dans les deux années qui suivent, pas moins de quinze opérations sont menées. Yvan Gradis insiste sur le caractère « pacifique et non-violent » de ces actions. Lorsqu’ils sont interpellés, les militants mettent un point d’honneur à ne pas résister et à respecter les forces de l’ordre. Entre ses activités professionnelles d’écrivain, acteur et correcteur, Yvan Gradis a participé en 17 ans à plusieurs dizaines de barbouillages, notamment au sein du Collectif des déboulonneurs.
Ces actions l’ont conduit de nombreuses fois au poste, une fois en garde à vue (20 heures) et, parfois, devant le tribunal correctionnel où il a le plus souvent été condamné à des peines symboliques. À quelques occasions, même, les juges l’ont relaxé, comme le 2 avril 2010 alors qu’il comparaissait avec un autre militant pour un barbouillage sur les Champs-Élysées en 2008. Mais le parquet fait appel et, le 26 juin 2012, les deux barbouilleurs sont condamnés à une amende de 200 euros. L’année suivante, Yvan Gradis est convoqué par la police pour un prélèvement de son ADN en vue de son inscription au fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG). Mais, alors en voyage, il pose un lapin aux policiers et, pendant deux ans, n’entend plus parler d’eux.
En mai 2015, pourtant, Yvan Gradis est à nouveau convoqué au commissariat. Il répond cette fois à la convocation, mais refuse de donner son ADN. Les policiers l’informent alors qu’il sera poursuivi devant le tribunal correctionnel, où il risquera jusqu’à un an de prison et 15 000 euros d’amende. La justice semble une nouvelle fois oublier le militant, qui n’entend plus parler de l’affaire pendant deux autres années. Le 31 août 2017, les policiers le font venir une troisième fois. Cette fois, Yvan Gradis repart avec une convocation pour un procès.
À l’audience, l’accusé était venu avec, outre son comité de soutien, deux témoignages écrits de poids : l’un signé par Edgard Morin et l’autre par Jean-Claude Ameisen, président d’honneur du Comité consultatif national d’éthique. Ce dernier avait rendu, en avril 2007, un avis qui dénonçait déjà à l’époque le fichage génétique pratiqué en France. Cela fait en réalité de nombreuses années que le FNAEG est la cible de critiques, et l’acte de désobéissance civile d’Yvan Gradis est loin d’être un cas isolé.
Le FNAEG a été à l’origine créé en 1998, dans une France traumatisée par les révélations sur le tueur en série Guy Georges, dans le but d’y inscrire les personnes mises en cause ou condamnées pour des crimes et délits sexuels. Mais il a très vite connu un élargissement considérable de son champ d’application. En 2001 notamment, la loi sur la sécurité quotidienne du ministre de l’intérieur socialiste Daniel Vaillant l’étend aux crimes d’atteinte volontaire à la vie, aux actes de torture, au terrorisme, aux violences volontaires… En 2003, la loi sur la sécurité intérieure de Nicolas Sarkozy y ajoute une nouvelle liste de délits, comme les dégradations ou les outrages à agent.
Ces élargissements successifs ont logiquement fait exploser le nombre de personnes fichées génétiquement, notamment en intégrant les militants interpellés lors de manifestations via les infractions de dégradation et d’outrage à agent. Elles sont passées de quelques milliers d’inscriptions au début des années 2000 à 127 814 en 2005, avant de dépasser la barre du million en 2009. En 2011, ce sont 2 005 885 personnes qui étaient fichées. Un nouveau cap a été franchi en 2015, avec 3 006 991 inscriptions. Et les conflits sociaux de l’année 2016 n’ont pu que faire gonfler encore le FNAEG de manière significative.
Au fil des années, de nombreux syndicalistes, manifestants ou faucheurs volontaires d’OGM ont été inscrits au FNAEG. Beaucoup d’entre eux ont, comme Yvan Gradis, refusé le prélèvement et ont tenté de contester leur condamnation avec des succès divers. Saisi par une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) déposée par des faucheurs d’OGM, le Conseil constitutionnel avait validé, dans une décision rendue le 16 septembre 2010, le principe du fichier, mais en émettant certaines réserves. Les Sages soulignaient notamment que le dispositif légal encadrant le FNAEG était encore, en l’état, incomplet.
L’article 706-54 du code pénal régissant l’inscription au fichier stipule en effet : « Un décret en Conseil d’État pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés détermine les modalités d’application du présent article. Ce décret précise notamment la durée de conservation des informations enregistrées. »
Or ce décret n’a jamais été pris. Par défaut, c’est donc une durée maximale de quarante ans de stockage, prévue par l’article R53-14 du code de procédure pénale, qui s’applique quelle que soit l’infraction, pour le tueur en série comme pour le militant interpellé lors d’une manifestation. Le Conseil constitutionnel rappelait donc, dans sa décision, la nécessité « de proportionner la durée de conservation de ces données personnelles, compte tenu de l’objet du fichier, à la nature ou à la gravité des infractions concernées ».
Sept années plus tard, ce décret n’a toujours pas été pris. Contacté par Mediapart, le ministère de l’intérieur indique que le texte est toujours en cours d’élaboration. Le sujet, précise-t-il, a été « pris en compte » et « le décret devrait être prêt dans les semaines à venir ». Il y a pourtant urgence car le FNAEG est, depuis l’été dernier, officiellement en infraction avec les textes européens.
Le 22 juin 2017, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a en effet condamné la France après avoir été saisie par un manifestant condamné en 2009 pour refus de prélèvement d’ADN. En l’espèce, le plaignant était Jean-Michel Ayçaguer, un agriculteur basque de la ville d’Ossès, interpellé pour avoir donné des coups de parapluie en direction des CRS lors d’une manifestation émaillée d’accrochages avec les forces de l’ordre en 2008.
Dans sa décision, la CEDH rappelait les critiques émises en 2010 par le Conseil constitutionnel sur l’absence de décret et soulignait « qu’aucune différenciation n’est actuellement prévue en fonction de la nature et de la gravité de l’infraction commise, malgré l’importante disparité des situations susceptibles de se présenter, comme celle de M. Ayçaguer en atteste. Or, poursuivaient les magistrats, les agissements de celui-ci s’inscrivaient dans un contexte politique et syndical, et concernaient de simples coups de parapluie en direction de gendarmes ». En résumé, la CEDH estimait que des violences commises lors d’un mouvement social ne pouvaient être mises sur le même plan que « d’autres infractions particulièrement graves, à l’instar des infractions sexuelles, du terrorisme ou encore des crimes contre l’humanité ou la traite des êtres humains ».
En conclusion, la CEDH jugeait que le FNAEG violait l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme protégeant la vie privée et condamnait la France à verser à l’agriculteur 3 000 euros de dommages et intérêts, ainsi que 3 000 euros pour frais et dépens. Selon eux, la condamnation de Jean-Michel Ayçaguer « s’analyse en une atteinte disproportionnée au respect de sa vie privée et ne peut passer pour nécessaire dans une société démocratique ».
Cette condamnation est pourtant totalement ignorée des autorités françaises, comme le montrent le cas d’Yvan Gradis, convoqué par la police au mois d’août, mais également celui de Candice Marchal qui, elle, a fait six heures de garde à vue le 13 septembre dernier pour les mêmes faits. Cette journaliste pensait pourtant en avoir fini avec la justice. En 2010, Candice Marchal avait été impliquée dans une sombre affaire d’espionnage, qui avait secoué l’Audiovisuel extérieur de la France (AEF).
Il a fallu six années pour que l’affaire soit jugée et Candice Marchal condamnée pour vol de documents, à une peine de prison avec sursis et à une amende symbolique d’un euro. La journaliste avait repéré dans l’actualité la condamnation de la France par la CEDH, au mois de juin dernier. Lorsqu’elle est convoquée pour son prélèvement d’ADN, elle se rend au commissariat, la décision de la Cour à la main. Mais rien n’y fait. Devant son refus, les policiers appellent le parquet qui ordonne son placement en garde à vue. Elle ne sera libérée que six heures plus tard.
Comment expliquer que, après sa condamnation par la CEDH et en l’absence de décret, la France n’ait pas cessé de poursuivre les personnes refusant de donner leur ADN ? Contacté par Mediapart, le ministère de la justice n’a pas donné suite à nos questions. « La Direction des affaires criminelles et des grâces aurait pu faire une note, estime Alain Mikowski, avocat de Candice Marchal. L’arrêt de la CEDH est pourtant très clair, et il y avait eu des signes avant-coureurs avec la décision du Conseil constitutionnel de 2010. »« À l’origine, le FNAEG partait d’un bon esprit, poursuit Me Mikowski, mais aujourd’hui nous sommes face à un fichage généralisé de la population. En quoi peut-il être utile pour la justice de prendre l’ADN de quelqu’un comme Candice ? Si ce n’est pour effectuer un fichage génétique le plus large possible de la population, pour avoir les mailles du filet les plus fines possibles. »
L’avocat d’Yvan Gradis, Vincent Brengarth, n’a pas non plus manqué de rappeler aux juges la décision de la CEDH dans sa plaidoirie. « Si Yvan Gradis entre dans le fichier, il n’en ressortira pas avant les années 2050 », a-t-il souligné. Et s’il est condamné, cela signifie que l’on « s’assied littéralement sur l’arrêt rendu par la CEDH », a plaidé Me Brengarth. « On voit bien que l’affaire n’est pas si simple », a souligné l’avocat, avant de rappeler que l’article 55 de la Constitution française stipulait que « les traités ou accords régulièrement ratifiés », et donc la Convention européenne des droits de l’homme, ont « une autorité supérieure à celle des lois ».
Dénonçant le risque d’une « République du fichage perpétuel » et soulignant « l’intérêt général » que constitue l’engagement de son client « contre la résistance à cette agression publicitaire qui est devenue la norme », Me Brengarth a demandé sa relaxe. Dans son réquisitoire, le parquet n’a quant à lui aucunement évoqué l’arrêt de la CEDH et s’est contenté d’un rappel de la loi française. Il a cependant reconnu le caractère particulier des actions d’Yvan Gradis en demandant que son éventuelle condamnation soit accompagnée d’une dispense de peine. Le tribunal rendra sa décision le 3 novembre.
Candice Marchal, de son côté, comparaîtra le 10 octobre dans cette même 10e chambre correctionnelle du TGI de Paris. Comme Yvan Gradis, elle se dit déterminée à ne pas céder, quitte à être condamnée. « S’il le faut, j’irai jusqu’à la CEDH. C’est une question de principe », explique-t-elle. « Ce n’est pas parce que je suis journaliste. J’ai totalement conscience que beaucoup de personnes ne peuvent pas se permettre de refuser le prélèvement d’ADN et cèdent car cela signifie un nouveau procès, prendre un avocat… Moi-même, cela ne me fait pas plaisir, poursuit-elle, mais c’est justement pour cela qu’il faut que ceux qui peuvent contester le fassent. Il faut qu’un maximum de personnes refuse ce fichage généralisé. Et j’irai jusqu’au bout. »
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Et
Dom et nos camarades
des Faucheureuses Volontaires Bretons comparaîtront le 15 novembre 2022
Nous serons présent.e.s à la foire régionale de Mûr de Bretagne ce week end.
Retrouvez nous dans l’espace associatif
Nous partagerons notre stand avec le comité de Soutien aux Faucheurs Volontaires, les Faucheurs Volontaires BZH et BCLFU (Bretagne contre les Fermes Usines)