PROCES DES FAUCHEURS VOLONTAIRES D’OGM DIJON le 14 décembre 2022
COMMUNIQUE DE PRESSE
Six Faucheurs Volontaires d’OGM habitant la Côte-d’Or ont comparu ce mercredi 14 décembre au tribunal de Dijon, suite au fauchage le 15 avril 2017 d’une plate-forme de colza mise en place par la firme semencière KWS.
Cette action avait été revendiquée par une centaine de Faucheuses et Faucheurs Volontaires d’OGM venus de la France entière.
Dès le début de l’audience, le tribunal a refusé d’entendre les 32 d’entre eux qui s’étaient portés comparants volontaires pour être jugés solidairement avec les 6 prévenus.
Lors de ce procès, les Faucheurs Volontaires ont pu exprimer ce qui avait motivé leur action, appuyés par des témoignages de grande qualité, et par les plaidoiries de leurs avocats.
Il a été démontré que la firme KWS produisait bien des OGM réglementés, alors qu’elle affirmait le contraire, et qu’elle détenait bien des brevets faisant référence à des techniques produisant des OGM. D’autre part, ce fauchage ne lui avait nullement empêché d’inscrire de nouvelles variétés de
colza Clearfield, contrairement à ce qu’elle prétendait.
D’autres arguments ont été développés, notamment au sujet des variétés rendues tolérantes aux herbicides (VrTH), qui amenaient les agriculteurs à des impasses agronomiques, tout en ayant de gros impacts sur la qualité de l’air et de l’eau, et bien sûr sur notre santé à tous.
Le contexte politique et réglementaire fut aussi précisé : sous la pression des firmes comme KWS et des lobbies de la filière, le gouvernement poursuit un seul objectif, pousser à la modification de la loi sur les OGM (directive 2001-18) pour sortir de l’illégalité.
Depuis bientôt 3 ans le gouvernement français refuse toujours d’appliquer les injonctions du Conseil d’État faisant suite à l’arrêt de la Cour de Justice de l’Union Européenne de juillet 2018.
Le gouvernement actuel ne respecte pas les principes démocratiques…
Les firmes agro-industrielles telles que KWS veulent faire déréglementer les VrTH issues de mutagénèse appliquées in vitro sur cellules isolées (colza Clearfield par ex) et dans la foulée une grande partie des plantes obtenues par des nouvelles technologies OGM.
Arguant protéger l’innovation, ces lobbies n’ont pas attendu pour asséner leurs nouvelles fausses promesses à la planète entière : l’éradication de la faim et la lutte contre le réchauffement climatique grâce à des variétés tolérantes à la sécheresse.
Tout en reconnaissant la complexité du dossier, le procureur eut des mots très durs vis-à-vis des prévenus, présentant les Faucheurs comme «… un groupe qui dicte où est le bien et le mal… », « …l’embryon d’une forme de totalitarisme… », « … qui ne respecte pas les principes démocratiques… ».
Il requiert pour chacun l’obligation d’un stage de citoyenneté à réaliser dans les 6 mois, et de 1500 euros en cas de non-exécution.
Les parties civiles quant à elles, n’ont apporté aucune réponse aux arguments développés, et ont eu beaucoup de mal à justifier leurs prétentions financières exorbitantes en millions d’euros, qu’elles
ont finalement ramenées dans leurs conclusions à 40000 euros, s’agissant de préjudices « éventuels ».
La relaxe a bien évidemment été demandée lors des 2 brillantes plaidoiries des avocats des Faucheurs
La décision du tribunal est mise en délibéré, et le verdict sera rendu le 6 mars 2023 à 13h30
Le collectif des Faucheurs Volontaires
Contact : 06 26 60 13 28 ou 06 41 41 51 54
Le tribunal de Dijon a prononcé une peine de 800 euros d’amendes avec sursis et plus de 10.000 euros de préjudiceà l’encontre de six des faucheurs et faucheuses volontaires anti-OGM qui ont détruit une parcelle de colza OGM en avril 2017 à Villy-le-Moutier (Côte-d’Or).
12 Faucheurs et Faucheuses Volontaires Breton.ne.s «comparant.e.s volontaires» au Tribunal de Dijon, le 14 décembre 2022
6FaucheursVolontairesdeCôte-D’Ormisenexamen,ainsique33deleurscamarades «comparant.e.s volontaires», dont 12 FV breton.ne.s , sont convoqué.es ce mercredi 14 décembre prochain au Tribunal de Dijon.
Il leur est reproché d’avoir détruit, le 15 avril 2017 à Villy Le Moutier (Côte d’Or), 2,6 hectares d’essais de colza OGM, appartenant à la multinationale semencière allemande KWS, qui leur demande 8,5 millions d’€…de réparations ( le kg de semence de colza OGM a encore augmenté: X par 200! ).
Pour les FV Bzh, qui luttent depuis 20 ans contre les importations de soja OGM sur les ports de Brest, Lorient et Montoir de Bretagne, la substitution du soja OGM par du colza OGM ou du tournesol OGM est inacceptable, tant au niveau social qu’environnemental et sanitaire.
Les FV BZH dénoncent là-bas comme ici en Bretagne , par cette action entièrement assumée et revendiquée collectivement, la poursuite de l’agro-industrie-business qui mène notre agriculture, notre environnement et notre santé dans le mur.
Le nombre de paysans éliminés, toutes filières confondues, ne cesse d’augmenter, tandis que le PrésidentduConseilRégionaldeBretagneprivilégiele«sauvetage»desemploisagro-alimentaires industriels, refusant de regarder la réalité de l’emploi agricole breton.
Cette agro-industrie porte atteinte à notre environnement (eau, air, sol: nitrates et algues vertes, ammoniac, pesticides..) et à notre santé (nombre croissant des maladies professionnelles enfin reconnues surtout grâce à la détermination du CSVPO: Collectif de Soutien aux Victimes des Pesticides de l’Ouesthttps://victimepesticide-ouest.ecosolidaire.fr/ainsi que nombre croissant des maladies environnementales)
Enmêmetemps, ce mardi 6 décembre 2022, le Parlement Européen, en accord avec les États Membresdel’UE,vientdedéciderde«l’interdictiondel’importationdesproduitsdela déforestation » en Amazonie, dont le SOJA OGM donc, mais seulement après 2024, et sans aucun doute, avec les dérogations que ne manquera pas de demander l’agro-industrie, aprèsencore quelques années supplémentaires...
Ce qui atténue donc toutefois considérablement la portée de cette décision qualifiée d’« historique ».
Les Faucheuses et Faucheurs volontaires d’OGM se retrouvent donc dans l’obligation d’agir face à l’état de nécessité que crée l’État françaisenrefusanttoujours d’appliquer les injonctions du Conseil d’État faisant suite à l’arrêt de la Cour de Justice de l’Union Européenne.
Le 11 décembre 2022, les FV Bzh Contacts presse: Naj 0682676712
12 Falc’her ha Falc’herez a v-Breizh « barnet a youl vat » e Lezvarn Dijon, d’ar 14 a viz Kerzu 2022
6 Falcher eus departamant ar «Côte-D’Or-21»lakaet dindan evezh gant ar justis warlene, ha 33 eus o c’henseurted, 12 FV Bzh en o zouesk , a zo galvet dimerc’her 14 a viz Kerzu o tont dirak Lezvarn Dijon ( 21 ).
Rebechet e vez outo bezañ bet distrujet, d’ar 15 a viz Ebrel 2017, e Villy Le Moutier (Côte d’Or), 6 devezh-arad taolioù-esa kolfa OGK, hag a oa perc’hentiez an embregerezh hadoù etrevroadel KWS lec’hiet e bro-Alamagn, pe hini a c’houlenn 8,5 million € diganto evit an domaj graet outi ( ar c’hilo had colza OGK a zo aet e briz kaer war-raok: X dre 200! ).
EvitarFalcherienhagarFalc’herezedBzh,hagazoostourmabaoe20vloaza-enep emborzhadurioù soja OGK e porzhioù Brest, An Oriant ha Mouster Al Loch, ne c’heller ket degemered tremen eus ar soja OGKd’ar c’holfa OGK pe d’an tro-heol OGK, kement war an dachenn sokial ha war dachenn an endro pe hini ar yec’hed.
Dre an tolpad-se, kaset da benn a-stroll, hag a zegemeront war o chouk penn da benn, Falc’herien ha Falc’herezed BZH a zispenn eno evel amañ e Breizh emdroadur al labour-douar greantel-business a gas hol labour-douar, hon endro hag hor yec’hed a-benn d’ar c’hae.
An niver a beizanted skarzhet, ne vern pe hentenn-broduiñ e vefent warni, ne baouez ket da greskiñ, pa vez e keit-all Prezidant Kuzul Rannvro Breizh o klask «tre ma chellsaveteiñ»an implijoù greantelhagonache-seselleddavatouzhstadallabour-douara-fedimplij.
Al labour-douar greantel a wall hon endro (dour, aer, douar: temz ha bezhin glas, ammoniak, ampoezonioù a bep seurt..) hag hor yec’hed (niver ar c’hleñvedoù micherel a zo o kreskiñ hag a vez anavezeta-benn ar fin met dreistholl a drugarez da nerzh-kalon izili ar CSVPO: Collectif de Soutien aux Victimes des Pesticides de l’Ouesthttps://victimepesticide-ouest.ecosolidaire.fr/ evel ma kresk ivez ar c’hleñvedoù o tont diwar an endro)
En hevelep koulz, dimeurzh diwezhañ, d’ar 6 a viz Kerzu 2022, Parlamant Europa, a-du gant ar Stadoù ezel eus Unvaniezh Europa, en deus divizet «difenn na vefe emborzhiet en UE kement tra liammet ouzh an dic’hoadañ» en Amazonia, ar SOJA OGK eta e touesk, met goude 2024 hepken, ha fasil gant an dirojañsoù a vo goulennet hep mar ebet gant al labour-douar greantel, goude meur a vloavezh all c’hoazh ouzhpenn…
Ar pezh a zistera un tamm mat ar spi douget gant seurt disentez hag a lavar lod «istorel».
Ar Falc’herien hag ar Falc’herezed OGK atav a youl vat en emgav eta er stad a redi ha rediet d’ober un dra bennak pa ne fell ket da bennadurezhioù ar Stad C’Hall sentiñ ouzh dizentezioù ar C’Huzul-Stad, disentezioù savet da heul harz Lezvarn Justis Unvaniezh Europa.
D’an 11 a viz Kerzu 2022, FV Bzh Darempred evit ar chazetennoù: Jil 0672521751
Le 10 novembre 2021, une centaine de faucheurs et faucheuses volontaires d’OGM venu.e.s de toute la France ont mené une inspection citoyenne visant à vérifier la présence de semences de tournesols et de colza VrTH à Calmont ( Aveyron) dans les locaux de la RAGT.
Ces semences relèvent, selon la Cour de justice de l’Union européenne et le Conseil d’État français de la réglementation sur les OGM, mais à ce jour cette réglementation n’est toujours pas appliquée. Ces OGM sont semés dans les champs.
51 faucheurs volontaires comparaîtront donc devant le tribunal judiciaire de Rodez, plus un journaliste de Reporterre, Grégoire Souchay.
Ce dernier est poursuivi pour les mêmes faits que le collectif à savoir la destruction de sacs de semences de tournesol et de colza OGM et vol de propriétés industrielles.
Grégoire Souchay n’est pas faucheur volontaire et ne faisait que son métier, informer les lecteurs sur une action citoyenne non violente. Nous tenons à rappeler que la liberté de la presse est une donnée non-négociable de notre démocratie et que sa mise en cause dans cette affaire en est une spoliation.
Depuis près de vingt ans, nous luttons contre l’artificialisation du vivant et c’est la première fois qu’un journaliste est inquiété pour avoir couvert une de nos actions. Les violations de l’État de droit deviennent de plus en plus fréquentes de la part du gouvernement.
Cette poursuite devant un tribunal d’un journaliste ne faisant que son travail en est une illustration supplémentaire comme l’est le non respect par le gouvernement de la décision de la Cour de justice Européenne ou celle du Conseil d’État que dénonçaient les Faucheuses et les Faucheurs d’OGM, le 10 novembre 2021.
Nous, faucheurs et faucheuses volontaires continuerons à lutter pour le respect de tout le vivant, et pour une alimentation saine .
Nous serons toujours aux côtés de ceux et celles qui portent cette parole.
Nous affirmons notre soutien à tous les journalistes faisant librement leur travail et qui seraient attaqués pour l’usage de cette liberté.
Au mois de juin dernier, la Cour européenne des droits de l’homme a condamné la France pour avoir voulu inscrire un manifestant au fichier national des empreintes génétiques, le FNAEG. Trois mois plus tard, la police continue à exiger des prélèvements et le parquet à poursuivre les récalcitrants. Yvan Gradis, militant antipublicitaire, comparaissait vendredi.
Le procès d’Yvan Gradis pour refus de prélèvement d’ADN s’annonçait comme l’événement de la journée d’audiences de la 10e chambre correctionnelle du TGI de Paris, vendredi 6 octobre. Sa vingtaine de soutiens ayant fait le déplacement avaient patienté tout l’après-midi pour voir finalement comparaître, en fin de journée, le militant antipublicitaire et apôtre de la désobéissance civile.
Yvan Gradis ne les a pas déçus. « Je dois vous dire la vérité qui est simple : je suis un barbouilleur non violent. Et je trouve monstrueux que l’on demande mon ADN, a-t-il lancé aux trois magistrates en introduction. Je suis un citoyen qui a des tripes et une conscience morale. Je suis prêt à affronter les sanctions que je mérite. » Le ton de l’audience était donné. Après une rixe dans un hôtel de luxe et quelques petites affaires de cannabis, la 10e chambre correctionnelle se trouvait, pour sa dernière audience de la journée, face à un dossier politique.
L’accusé n’est d’ailleurs pas un inconnu des tribunaux. À 59 ans, il a même un long passé de militant antipublicitaire l’ayant conduit plus d’une fois devant la justice. Yvan Gradis explique être entré « en publiphobie et en boycottage de la publicité » dès l’âge de 23 ans, en 1981. Au fil des années, son engagement prend une forme plus concrète. En 1990, il crée la lettre d’information Le Publiphobe et, deux ans plus tard, il cofonde l’association Résistance à l’agression publicitaire (RAP) dont il prend la présidence.
Durant ces années, Yvan Gradis et son association luttent contre l’invasion publicitaire de l’espace public par les voies légales, en demandant le décrochage de panneaux d’affichage devant les tribunaux. Mais cette stratégie montre ses limites. En 2000, il décide de passer à l’action et d’entrer en désobéissance civile. Il publie un manifeste, Vers la légitime réponse, appelant au « barbouillage » des panneaux publicitaires.
Dans les deux années qui suivent, pas moins de quinze opérations sont menées. Yvan Gradis insiste sur le caractère « pacifique et non-violent » de ces actions. Lorsqu’ils sont interpellés, les militants mettent un point d’honneur à ne pas résister et à respecter les forces de l’ordre. Entre ses activités professionnelles d’écrivain, acteur et correcteur, Yvan Gradis a participé en 17 ans à plusieurs dizaines de barbouillages, notamment au sein du Collectif des déboulonneurs.
Ces actions l’ont conduit de nombreuses fois au poste, une fois en garde à vue (20 heures) et, parfois, devant le tribunal correctionnel où il a le plus souvent été condamné à des peines symboliques. À quelques occasions, même, les juges l’ont relaxé, comme le 2 avril 2010 alors qu’il comparaissait avec un autre militant pour un barbouillage sur les Champs-Élysées en 2008. Mais le parquet fait appel et, le 26 juin 2012, les deux barbouilleurs sont condamnés à une amende de 200 euros. L’année suivante, Yvan Gradis est convoqué par la police pour un prélèvement de son ADN en vue de son inscription au fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG). Mais, alors en voyage, il pose un lapin aux policiers et, pendant deux ans, n’entend plus parler d’eux.
En mai 2015, pourtant, Yvan Gradis est à nouveau convoqué au commissariat. Il répond cette fois à la convocation, mais refuse de donner son ADN. Les policiers l’informent alors qu’il sera poursuivi devant le tribunal correctionnel, où il risquera jusqu’à un an de prison et 15 000 euros d’amende. La justice semble une nouvelle fois oublier le militant, qui n’entend plus parler de l’affaire pendant deux autres années. Le 31 août 2017, les policiers le font venir une troisième fois. Cette fois, Yvan Gradis repart avec une convocation pour un procès.
À l’audience, l’accusé était venu avec, outre son comité de soutien, deux témoignages écrits de poids : l’un signé par Edgard Morin et l’autre par Jean-Claude Ameisen, président d’honneur du Comité consultatif national d’éthique. Ce dernier avait rendu, en avril 2007, un avis qui dénonçait déjà à l’époque le fichage génétique pratiqué en France. Cela fait en réalité de nombreuses années que le FNAEG est la cible de critiques, et l’acte de désobéissance civile d’Yvan Gradis est loin d’être un cas isolé.
Le FNAEG a été à l’origine créé en 1998, dans une France traumatisée par les révélations sur le tueur en série Guy Georges, dans le but d’y inscrire les personnes mises en cause ou condamnées pour des crimes et délits sexuels. Mais il a très vite connu un élargissement considérable de son champ d’application. En 2001 notamment, la loi sur la sécurité quotidienne du ministre de l’intérieur socialiste Daniel Vaillant l’étend aux crimes d’atteinte volontaire à la vie, aux actes de torture, au terrorisme, aux violences volontaires… En 2003, la loi sur la sécurité intérieure de Nicolas Sarkozy y ajoute une nouvelle liste de délits, comme les dégradations ou les outrages à agent.
Ces élargissements successifs ont logiquement fait exploser le nombre de personnes fichées génétiquement, notamment en intégrant les militants interpellés lors de manifestations via les infractions de dégradation et d’outrage à agent. Elles sont passées de quelques milliers d’inscriptions au début des années 2000 à 127 814 en 2005, avant de dépasser la barre du million en 2009. En 2011, ce sont 2 005 885 personnes qui étaient fichées. Un nouveau cap a été franchi en 2015, avec 3 006 991 inscriptions. Et les conflits sociaux de l’année 2016 n’ont pu que faire gonfler encore le FNAEG de manière significative.
Au fil des années, de nombreux syndicalistes, manifestants ou faucheurs volontaires d’OGM ont été inscrits au FNAEG. Beaucoup d’entre eux ont, comme Yvan Gradis, refusé le prélèvement et ont tenté de contester leur condamnation avec des succès divers. Saisi par une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) déposée par des faucheurs d’OGM, le Conseil constitutionnel avait validé, dans une décision rendue le 16 septembre 2010, le principe du fichier, mais en émettant certaines réserves. Les Sages soulignaient notamment que le dispositif légal encadrant le FNAEG était encore, en l’état, incomplet.
L’article 706-54 du code pénal régissant l’inscription au fichier stipule en effet : « Un décret en Conseil d’État pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés détermine les modalités d’application du présent article. Ce décret précise notamment la durée de conservation des informations enregistrées. »
Or ce décret n’a jamais été pris. Par défaut, c’est donc une durée maximale de quarante ans de stockage, prévue par l’article R53-14 du code de procédure pénale, qui s’applique quelle que soit l’infraction, pour le tueur en série comme pour le militant interpellé lors d’une manifestation. Le Conseil constitutionnel rappelait donc, dans sa décision, la nécessité « de proportionner la durée de conservation de ces données personnelles, compte tenu de l’objet du fichier, à la nature ou à la gravité des infractions concernées ».
Sept années plus tard, ce décret n’a toujours pas été pris. Contacté par Mediapart, le ministère de l’intérieur indique que le texte est toujours en cours d’élaboration. Le sujet, précise-t-il, a été « pris en compte » et « le décret devrait être prêt dans les semaines à venir ». Il y a pourtant urgence car le FNAEG est, depuis l’été dernier, officiellement en infraction avec les textes européens.
Le 22 juin 2017, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a en effet condamné la France après avoir été saisie par un manifestant condamné en 2009 pour refus de prélèvement d’ADN.
En l’espèce, le plaignant était Jean-Michel Ayçaguer, un agriculteur basque de la ville d’Ossès, interpellé pour avoir donné des coups de parapluie en direction des CRS lors d’une manifestation émaillée d’accrochages avec les forces de l’ordre en 2008.
Dans sa décision, la CEDH rappelait les critiques émises en 2010 par le Conseil constitutionnel sur l’absence de décret et soulignait « qu’aucune différenciation n’est actuellement prévue en fonction de la nature et de la gravité de l’infraction commise, malgré l’importante disparité des situations susceptibles de se présenter, comme celle de M. Ayçaguer en atteste. Or, poursuivaient les magistrats, les agissements de celui-ci s’inscrivaient dans un contexte politique et syndical, et concernaient de simples coups de parapluie en direction de gendarmes ». En résumé, la CEDH estimait que des violences commises lors d’un mouvement social ne pouvaient être mises sur le même plan que « d’autres infractions particulièrement graves, à l’instar des infractions sexuelles, du terrorisme ou encore des crimes contre l’humanité ou la traite des êtres humains ».
En conclusion, la CEDH jugeait que le FNAEG violait l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme protégeant la vie privée et condamnait la France à verser à l’agriculteur 3 000 euros de dommages et intérêts, ainsi que 3 000 euros pour frais et dépens. Selon eux, la condamnation de Jean-Michel Ayçaguer « s’analyse en une atteinte disproportionnée au respect de sa vie privée et ne peut passer pour nécessaire dans une société démocratique ».
Cette condamnation est pourtant totalement ignorée des autorités françaises, comme le montrent le cas d’Yvan Gradis, convoqué par la police au mois d’août, mais également celui de Candice Marchal qui, elle, a fait six heures de garde à vue le 13 septembre dernier pour les mêmes faits. Cette journaliste pensait pourtant en avoir fini avec la justice. En 2010, Candice Marchal avait été impliquée dans une sombre affaire d’espionnage, qui avait secoué l’Audiovisuel extérieur de la France (AEF).
Il a fallu six années pour que l’affaire soit jugée et Candice Marchal condamnée pour vol de documents, à une peine de prison avec sursis et à une amende symbolique d’un euro. La journaliste avait repéré dans l’actualité la condamnation de la France par la CEDH, au mois de juin dernier. Lorsqu’elle est convoquée pour son prélèvement d’ADN, elle se rend au commissariat, la décision de la Cour à la main. Mais rien n’y fait. Devant son refus, les policiers appellent le parquet qui ordonne son placement en garde à vue. Elle ne sera libérée que six heures plus tard.
Comment expliquer que, après sa condamnation par la CEDH et en l’absence de décret, la France n’ait pas cessé de poursuivre les personnes refusant de donner leur ADN ? Contacté par Mediapart, le ministère de la justice n’a pas donné suite à nos questions. « La Direction des affaires criminelles et des grâces aurait pu faire une note, estime Alain Mikowski, avocat de Candice Marchal. L’arrêt de la CEDH est pourtant très clair, et il y avait eu des signes avant-coureurs avec la décision du Conseil constitutionnel de 2010. »« À l’origine, le FNAEG partait d’un bon esprit, poursuit Me Mikowski, mais aujourd’hui nous sommes face à un fichage généralisé de la population. En quoi peut-il être utile pour la justice de prendre l’ADN de quelqu’un comme Candice ? Si ce n’est pour effectuer un fichage génétique le plus large possible de la population, pour avoir les mailles du filet les plus fines possibles. »
L’avocat d’Yvan Gradis, Vincent Brengarth, n’a pas non plus manqué de rappeler aux juges la décision de la CEDH dans sa plaidoirie. « Si Yvan Gradis entre dans le fichier, il n’en ressortira pas avant les années 2050 », a-t-il souligné. Et s’il est condamné, cela signifie que l’on « s’assied littéralement sur l’arrêt rendu par la CEDH », a plaidé Me Brengarth. « On voit bien que l’affaire n’est pas si simple », a souligné l’avocat, avant de rappeler que l’article 55 de la Constitution française stipulait que « les traités ou accords régulièrement ratifiés », et donc la Convention européenne des droits de l’homme, ont « une autorité supérieure à celle des lois ».
Dénonçant le risque d’une « République du fichage perpétuel » et soulignant « l’intérêt général » que constitue l’engagement de son client « contre la résistance à cette agression publicitaire qui est devenue la norme », Me Brengarth a demandé sa relaxe. Dans son réquisitoire, le parquet n’a quant à lui aucunement évoqué l’arrêt de la CEDH et s’est contenté d’un rappel de la loi française. Il a cependant reconnu le caractère particulier des actions d’Yvan Gradis en demandant que son éventuelle condamnation soit accompagnée d’une dispense de peine. Le tribunal rendra sa décision le 3 novembre.
Candice Marchal, de son côté, comparaîtra le 10 octobre dans cette même 10e chambre correctionnelle du TGI de Paris. Comme Yvan Gradis, elle se dit déterminée à ne pas céder, quitte à être condamnée. « S’il le faut, j’irai jusqu’à la CEDH. C’est une question de principe », explique-t-elle. « Ce n’est pas parce que je suis journaliste. J’ai totalement conscience que beaucoup de personnes ne peuvent pas se permettre de refuser le prélèvement d’ADN et cèdent car cela signifie un nouveau procès, prendre un avocat… Moi-même, cela ne me fait pas plaisir, poursuit-elle, mais c’est justement pour cela qu’il faut que ceux qui peuvent contester le fassent. Il faut qu’un maximum de personnes refuse ce fichage généralisé. Et j’irai jusqu’au bout. »
JUIN 2017 : la France condamnée par la CEDH pour fichage génétique
La justice européenne a adressé, jeudi 22 juin, un sérieux avertissement à la France. Le jour même où Emmanuel Macron annonçait vouloir modifier notre législation afin de faciliter les croisements de fichiers, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a jugé contraire aux textes européens le Fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG) et condamné la France pour « atteinte disproportionnée » à la vie privée.
Les juges européens avaient été saisis par Jean-Michel Ayçaguer, un agriculteur basque de la ville d’Ossès, condamné en 2009 pour avoir refusé un prélèvement génétique en vue de son inscription au FNAEG. Cette condamnation faisait suite à une manifestation organisée le 17 janvier 2008 à Ainharp par le syndicat agricole Euskal Erriko Laborarien Batasuna et le Groupement foncier agricole mutuel Lurra. Dans un contexte particulièrement tendu, le rassemblement s’était terminé par quelques accrochages avec les forces de l’ordre.
Jean-Michel Ayçaguer avait été interpellé pour avoir été vu donnant des coups de parapluie en direction de gendarmes. Placé en garde à vue, il avait été condamné dans la foulée à deux mois de prison avec sursis pour « violences avec arme sur une personne dépositaire de l’autorité publique ». Au mois de décembre 2008, l’agriculteur était à nouveau convoqué, mais cette fois pour un prélèvement génétique en vue de son inscription au FNAEG. Face à son refus, le tribunal de grande instance de Bayonne l’avait condamné à une amende de 500 euros.
La CEDH a donc estimé que cette condamnation était contraire à l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme protégeant la vie privée et a condamné la France à verser à l’agriculteur 3 000 euros de dommages et intérêts, ainsi que 3 000 euros pour frais et dépens. Mais surtout, les juges européens ont condamné en des termes très fermes le FNAEG tel qu’il est actuellement géré par la France. Selon eux, la condamnation de Jean-Michel Ayçaguer « s’analyse en une atteinte disproportionnée au respect de sa vie privée et ne peut passer pour nécessaire dans une société démocratique ».
Il s’agit là d’une importante victoire pour les défenseurs des droits de l’homme, militants, syndicalistes… qui, depuis des années, dénoncent les détournements du FNAEG à des fins de répression sociale. Ce fichier avait été à l’origine créé en 1998 dans le but d’y inscrire les personnes mises en cause ou condamnées pour des crimes et délits sexuels. Mais, il a très vite connu une élargissement considérable de son champ d’application. En 2001 notamment, la loi sur la sécurité quotidienne présentée par le ministre de l’intérieur socialiste Daniel Vaillant l’étend aux crimes d’atteintes volontaires à la vie, aux actes de torture, au terrorisme, aux violences volontaires… En 2003, la loi sur la sécurité intérieure de Nicolas Sarkozy y ajoute une nouvelle liste de délits, comme les dégradations ou les outrages à agent.
Avec l’expansion constante des crimes et délits concernés, la croissance du nombre de personnes inscrites au FNAEG a été exponentielle. Elles sont par exemple passées de 2 807 en 2003 à 330 000 en 2006. Selon la CNIL, le fichier contenait, au 1er septembre 2013, 2 547 499 profils génétiques, dont 1,9 millions de personnes mises en cause, 430 298 personnes condamnées et 149 097 traces non identifiées.
Mais surtout, le FNAEG est critiqué pour son application à de nombreux militants. Les rassemblements et manifestations sont souvent l’occasion, en effet, d’affrontements avec les forces de l’ordre ou de dégradations. Autant de délits permettant une inscription au fichier. Au fil des années, de nombreux syndicalistes, manifestants ou faucheurs volontaires d’OGM ont ainsi été inscrits au FNAEG. Beaucoup d’entre eux ont, comme Jean-Michel Ayçaguer, refusé le prélèvement et ont tenté de contester leur condamnation.
Saisi par des faucheurs d’OGM, le Conseil constitutionnel avait validé, dans une décision rendue le 16 septembre 2010, le principe du fichier, mais en émettant certaines réserves. Les Sages soulignaient notamment la nécessité « de proportionner la durée de conservation de ces données personnelles, compte tenu de l’objet du fichier, à la nature ou à la gravité des infractions concernées ». C’est justement sur ce point que se base la CEDH pour condamner la France. Les juges européens soulignent en effet que l’article R. 53-14 du code de procédure pénale régissant la conservation des données ne prévoit qu’une durée globale de 40 ans, sans tenir compte de la gravité des faits.
La Cour européenne relève « qu’aucune différenciation n’est actuellement prévue en fonction de la nature et de la gravité de l’infraction commise, malgré l’importante disparité des situations susceptibles de se présenter, comme celle de M. Ayçaguer en atteste. Or, poursuivent les magistrats, les agissements de celui-ci s’inscrivaient dans un contexte politique et syndical, et concernaient de simples coups de parapluie en direction de gendarmes ». En résumé, la CEDH estime que des violences commises lors d’un mouvement social ne peuvent être mises sur le même plan que « d’autres infractions particulièrement graves, à l’instar des infractions sexuelles, du terrorisme ou encore des crimes contre l’humanité ou la traite des êtres humains ».
Le Syndicat de la magistrature s’est félicité, dans un communiqué, de cette décision et a appelé à « une réforme profonde du fichage génétique : restriction aux seules personnes condamnées, limitation des infractions visées, rétablissement d’une autorisation judiciaire préalable, réduction de la durée de conservation et ouverture de possibilité d’effacement effectives. Afin d’effacer l’empreinte indélébile que ce fichage massif laisse sur nos droits ».
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~Notons d’ores et déjà la date du procès de Rennes en janvier 2023
Rendez vous
le 17 janvier 2023 – 14 h
Cour d’Appel de Rennes
Une action d’intérêt général n’est pas un crime !!!
La Charte de l’environnement de 20041, inscrite dans le préambule de la Constitution de la République, stipule que : «Toute personne a le devoir de prendre part à la préservation et à l’amélioration de l’environnement» étant donné que «chacun a le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé.»
Et pourtant, des militant.e.s ayant participé le 19 mars dernier au blocage d’un train de céréales destinées à des fermes usines sont aujourd’hui considérés comme des délinquants, quand ceux qui polluent, détruisent les paysanneries ici en Bretagne comme partout ailleurs dans le monde, malmènent les corps de celles et ceux qui travaillent dans l’agro-industrie, maltraitent les animaux, font de l’optimisation fiscale, spéculent sur les denrées alimentaires, nous empoisonnent massivement, à petit feu ou brutalement, et contribuent lourdement au dérèglement climatique, ne rendent jamais compte de leurs actes devant la justice.
Ces fermes usines ne sont que l’aboutissement d’un vaste mécanisme d’exploitation et d’accaparement colonial qui vaut à l’agriculture bretonne de disposer de 4 foisla surface agricole utile régionaledans le reste du monde en important soja OGM, huile de palme et céréales pour les réexporter transformés en poudre de lait MGV 20 (mélange de la poudre de lait écrémé avec 20% de matière grasse végétale) en Afrique, poulets export PAC au Moyen-Orient, viande de porc en Chine, sans parler du maïs incorporé dans les méthaniseurs des usines à lisier pour le gaz-énergie, ni du colza pour le diester.
C’est parce que les fermes usines détruisent nos vies, nos emplois, notre environnement et notre santé que les militant.e.s du collectif « Bretagne contre les fermes usines », prennent leurs responsabilités en conduisant des actions de désobéissance civile.
Leur action, non-violente, symbolique, et spectaculaire, reste guidée par le souci d’alerter l’ensemble des citoyennes et citoyens qui attendent des actes politiques forts pour bâtir des filières alimentaires qui créent des emplois de qualité et permettent à toutes et à tous d’avoir accès à une alimentation saine.
Une telle action d’intérêt général est un cri, et non un crime, qui concerne tout le monde. Il nous appelle à être toutes et tous solidaires et responsables à leurs côtés.
Au mois de juin dernier, la Cour européenne des droits de l’homme a condamné la France pour avoir voulu inscrire un manifestant au fichier national des empreintes génétiques, le FNAEG. Trois mois plus tard, la police continue à exiger des prélèvements et le parquet à poursuivre les récalcitrants. Yvan Gradis, militant antipublicitaire, comparaissait vendredi.
Le procès d’Yvan Gradis pour refus de prélèvement d’ADN s’annonçait comme l’événement de la journée d’audiences de la 10e chambre correctionnelle du TGI de Paris, vendredi 6 octobre. Sa vingtaine de soutiens ayant fait le déplacement avaient patienté tout l’après-midi pour voir finalement comparaître, en fin de journée, le militant antipublicitaire et apôtre de la désobéissance civile.
Yvan Gradis ne les a pas déçus. « Je dois vous dire la vérité qui est simple : je suis un barbouilleur non violent. Et je trouve monstrueux que l’on demande mon ADN, a-t-il lancé aux trois magistrates en introduction. Je suis un citoyen qui a des tripes et une conscience morale. Je suis prêt à affronter les sanctions que je mérite. » Le ton de l’audience était donné. Après une rixe dans un hôtel de luxe et quelques petites affaires de cannabis, la 10e chambre correctionnelle se trouvait, pour sa dernière audience de la journée, face à un dossier politique.
L’accusé n’est d’ailleurs pas un inconnu des tribunaux. À 59 ans, il a même un long passé de militant antipublicitaire l’ayant conduit plus d’une fois devant la justice. Yvan Gradis explique être entré « en publiphobie et en boycottage de la publicité » dès l’âge de 23 ans, en 1981. Au fil des années, son engagement prend une forme plus concrète. En 1990, il crée la lettre d’information Le Publiphobe et, deux ans plus tard, il cofonde l’association Résistance à l’agression publicitaire (RAP) dont il prend la présidence.
Durant ces années, Yvan Gradis et son association luttent contre l’invasion publicitaire de l’espace public par les voies légales, en demandant le décrochage de panneaux d’affichage devant les tribunaux. Mais cette stratégie montre ses limites. En 2000, il décide de passer à l’action et d’entrer en désobéissance civile. Il publie un manifeste, Vers la légitime réponse, appelant au « barbouillage » des panneaux publicitaires.
Dans les deux années qui suivent, pas moins de quinze opérations sont menées. Yvan Gradis insiste sur le caractère « pacifique et non-violent » de ces actions. Lorsqu’ils sont interpellés, les militants mettent un point d’honneur à ne pas résister et à respecter les forces de l’ordre. Entre ses activités professionnelles d’écrivain, acteur et correcteur, Yvan Gradis a participé en 17 ans à plusieurs dizaines de barbouillages, notamment au sein du Collectif des déboulonneurs.
Ces actions l’ont conduit de nombreuses fois au poste, une fois en garde à vue (20 heures) et, parfois, devant le tribunal correctionnel où il a le plus souvent été condamné à des peines symboliques. À quelques occasions, même, les juges l’ont relaxé, comme le 2 avril 2010 alors qu’il comparaissait avec un autre militant pour un barbouillage sur les Champs-Élysées en 2008. Mais le parquet fait appel et, le 26 juin 2012, les deux barbouilleurs sont condamnés à une amende de 200 euros. L’année suivante, Yvan Gradis est convoqué par la police pour un prélèvement de son ADN en vue de son inscription au fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG). Mais, alors en voyage, il pose un lapin aux policiers et, pendant deux ans, n’entend plus parler d’eux.
En mai 2015, pourtant, Yvan Gradis est à nouveau convoqué au commissariat. Il répond cette fois à la convocation, mais refuse de donner son ADN. Les policiers l’informent alors qu’il sera poursuivi devant le tribunal correctionnel, où il risquera jusqu’à un an de prison et 15 000 euros d’amende. La justice semble une nouvelle fois oublier le militant, qui n’entend plus parler de l’affaire pendant deux autres années. Le 31 août 2017, les policiers le font venir une troisième fois. Cette fois, Yvan Gradis repart avec une convocation pour un procès.
À l’audience, l’accusé était venu avec, outre son comité de soutien, deux témoignages écrits de poids : l’un signé par Edgard Morin et l’autre par Jean-Claude Ameisen, président d’honneur du Comité consultatif national d’éthique. Ce dernier avait rendu, en avril 2007, un avis qui dénonçait déjà à l’époque le fichage génétique pratiqué en France. Cela fait en réalité de nombreuses années que le FNAEG est la cible de critiques, et l’acte de désobéissance civile d’Yvan Gradis est loin d’être un cas isolé.
Le FNAEG a été à l’origine créé en 1998, dans une France traumatisée par les révélations sur le tueur en série Guy Georges, dans le but d’y inscrire les personnes mises en cause ou condamnées pour des crimes et délits sexuels. Mais il a très vite connu un élargissement considérable de son champ d’application. En 2001 notamment, la loi sur la sécurité quotidienne du ministre de l’intérieur socialiste Daniel Vaillant l’étend aux crimes d’atteinte volontaire à la vie, aux actes de torture, au terrorisme, aux violences volontaires… En 2003, la loi sur la sécurité intérieure de Nicolas Sarkozy y ajoute une nouvelle liste de délits, comme les dégradations ou les outrages à agent.
Ces élargissements successifs ont logiquement fait exploser le nombre de personnes fichées génétiquement, notamment en intégrant les militants interpellés lors de manifestations via les infractions de dégradation et d’outrage à agent. Elles sont passées de quelques milliers d’inscriptions au début des années 2000 à 127 814 en 2005, avant de dépasser la barre du million en 2009. En 2011, ce sont 2 005 885 personnes qui étaient fichées. Un nouveau cap a été franchi en 2015, avec 3 006 991 inscriptions. Et les conflits sociaux de l’année 2016 n’ont pu que faire gonfler encore le FNAEG de manière significative.
Au fil des années, de nombreux syndicalistes, manifestants ou faucheurs volontaires d’OGM ont été inscrits au FNAEG. Beaucoup d’entre eux ont, comme Yvan Gradis, refusé le prélèvement et ont tenté de contester leur condamnation avec des succès divers. Saisi par une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) déposée par des faucheurs d’OGM, le Conseil constitutionnel avait validé, dans une décision rendue le 16 septembre 2010, le principe du fichier, mais en émettant certaines réserves. Les Sages soulignaient notamment que le dispositif légal encadrant le FNAEG était encore, en l’état, incomplet.
L’article 706-54 du code pénal régissant l’inscription au fichier stipule en effet : « Un décret en Conseil d’État pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés détermine les modalités d’application du présent article. Ce décret précise notamment la durée de conservation des informations enregistrées. »
Or ce décret n’a jamais été pris. Par défaut, c’est donc une durée maximale de quarante ans de stockage, prévue par l’article R53-14 du code de procédure pénale, qui s’applique quelle que soit l’infraction, pour le tueur en série comme pour le militant interpellé lors d’une manifestation. Le Conseil constitutionnel rappelait donc, dans sa décision, la nécessité « de proportionner la durée de conservation de ces données personnelles, compte tenu de l’objet du fichier, à la nature ou à la gravité des infractions concernées ».
Sept années plus tard, ce décret n’a toujours pas été pris. Contacté par Mediapart, le ministère de l’intérieur indique que le texte est toujours en cours d’élaboration. Le sujet, précise-t-il, a été « pris en compte » et « le décret devrait être prêt dans les semaines à venir ». Il y a pourtant urgence car le FNAEG est, depuis l’été dernier, officiellement en infraction avec les textes européens.
Le 22 juin 2017, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a en effet condamné la France après avoir été saisie par un manifestant condamné en 2009 pour refus de prélèvement d’ADN. En l’espèce, le plaignant était Jean-Michel Ayçaguer, un agriculteur basque de la ville d’Ossès, interpellé pour avoir donné des coups de parapluie en direction des CRS lors d’une manifestation émaillée d’accrochages avec les forces de l’ordre en 2008.
Dans sa décision, la CEDH rappelait les critiques émises en 2010 par le Conseil constitutionnel sur l’absence de décret et soulignait « qu’aucune différenciation n’est actuellement prévue en fonction de la nature et de la gravité de l’infraction commise, malgré l’importante disparité des situations susceptibles de se présenter, comme celle de M. Ayçaguer en atteste. Or, poursuivaient les magistrats, les agissements de celui-ci s’inscrivaient dans un contexte politique et syndical, et concernaient de simples coups de parapluie en direction de gendarmes ». En résumé, la CEDH estimait que des violences commises lors d’un mouvement social ne pouvaient être mises sur le même plan que « d’autres infractions particulièrement graves, à l’instar des infractions sexuelles, du terrorisme ou encore des crimes contre l’humanité ou la traite des êtres humains ».
En conclusion, la CEDH jugeait que le FNAEG violait l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme protégeant la vie privée et condamnait la France à verser à l’agriculteur 3 000 euros de dommages et intérêts, ainsi que 3 000 euros pour frais et dépens. Selon eux, la condamnation de Jean-Michel Ayçaguer « s’analyse en une atteinte disproportionnée au respect de sa vie privée et ne peut passer pour nécessaire dans une société démocratique ».
Cette condamnation est pourtant totalement ignorée des autorités françaises, comme le montrent le cas d’Yvan Gradis, convoqué par la police au mois d’août, mais également celui de Candice Marchal qui, elle, a fait six heures de garde à vue le 13 septembre dernier pour les mêmes faits. Cette journaliste pensait pourtant en avoir fini avec la justice. En 2010, Candice Marchal avait été impliquée dans une sombre affaire d’espionnage, qui avait secoué l’Audiovisuel extérieur de la France (AEF).
Il a fallu six années pour que l’affaire soit jugée et Candice Marchal condamnée pour vol de documents, à une peine de prison avec sursis et à une amende symbolique d’un euro. La journaliste avait repéré dans l’actualité la condamnation de la France par la CEDH, au mois de juin dernier. Lorsqu’elle est convoquée pour son prélèvement d’ADN, elle se rend au commissariat, la décision de la Cour à la main. Mais rien n’y fait. Devant son refus, les policiers appellent le parquet qui ordonne son placement en garde à vue. Elle ne sera libérée que six heures plus tard.
Comment expliquer que, après sa condamnation par la CEDH et en l’absence de décret, la France n’ait pas cessé de poursuivre les personnes refusant de donner leur ADN ? Contacté par Mediapart, le ministère de la justice n’a pas donné suite à nos questions. « La Direction des affaires criminelles et des grâces aurait pu faire une note, estime Alain Mikowski, avocat de Candice Marchal. L’arrêt de la CEDH est pourtant très clair, et il y avait eu des signes avant-coureurs avec la décision du Conseil constitutionnel de 2010. »« À l’origine, le FNAEG partait d’un bon esprit, poursuit Me Mikowski, mais aujourd’hui nous sommes face à un fichage généralisé de la population. En quoi peut-il être utile pour la justice de prendre l’ADN de quelqu’un comme Candice ? Si ce n’est pour effectuer un fichage génétique le plus large possible de la population, pour avoir les mailles du filet les plus fines possibles. »
L’avocat d’Yvan Gradis, Vincent Brengarth, n’a pas non plus manqué de rappeler aux juges la décision de la CEDH dans sa plaidoirie. « Si Yvan Gradis entre dans le fichier, il n’en ressortira pas avant les années 2050 », a-t-il souligné. Et s’il est condamné, cela signifie que l’on « s’assied littéralement sur l’arrêt rendu par la CEDH », a plaidé Me Brengarth. « On voit bien que l’affaire n’est pas si simple », a souligné l’avocat, avant de rappeler que l’article 55 de la Constitution française stipulait que « les traités ou accords régulièrement ratifiés », et donc la Convention européenne des droits de l’homme, ont « une autorité supérieure à celle des lois ».
Dénonçant le risque d’une « République du fichage perpétuel » et soulignant « l’intérêt général » que constitue l’engagement de son client « contre la résistance à cette agression publicitaire qui est devenue la norme », Me Brengarth a demandé sa relaxe. Dans son réquisitoire, le parquet n’a quant à lui aucunement évoqué l’arrêt de la CEDH et s’est contenté d’un rappel de la loi française. Il a cependant reconnu le caractère particulier des actions d’Yvan Gradis en demandant que son éventuelle condamnation soit accompagnée d’une dispense de peine. Le tribunal rendra sa décision le 3 novembre.
Candice Marchal, de son côté, comparaîtra le 10 octobre dans cette même 10e chambre correctionnelle du TGI de Paris. Comme Yvan Gradis, elle se dit déterminée à ne pas céder, quitte à être condamnée. « S’il le faut, j’irai jusqu’à la CEDH. C’est une question de principe », explique-t-elle. « Ce n’est pas parce que je suis journaliste. J’ai totalement conscience que beaucoup de personnes ne peuvent pas se permettre de refuser le prélèvement d’ADN et cèdent car cela signifie un nouveau procès, prendre un avocat… Moi-même, cela ne me fait pas plaisir, poursuit-elle, mais c’est justement pour cela qu’il faut que ceux qui peuvent contester le fassent. Il faut qu’un maximum de personnes refuse ce fichage généralisé. Et j’irai jusqu’au bout. »
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Et
Dom et nos camarades
des Faucheureuses Volontaires Bretons comparaîtront le 15 novembre 2022
l’avocat des Faucheurs aussi, les 3 faucheurs et la faucheuse aussi,
les copines et les copains Faucheurs Volontaires, Pisseurs Involontaires, membres du Collectif de Soutien aux victimes des pesticides de l’Ouest aussi, et bien d’autres ….
La place était décorée
Mais dès leur entrée en salle d’audience, l’avocat des FV, les FV et leurs témoins ont été informés du report du procès au 17 janvier 2023.
Selon la déclaration d’un des prévenu.e.s : “La juge unique a considéré que notre dossier était conséquent, une affaire plutôt facile à traiter mais qui relevait plutôt d’un problème sociétal qu’un problème juridique…
Elle préfère aussi qu’une collégiale de 3 juges juge notre dossier…“
3 juges seront donc prévus pour l’audience du 17 janvier prochain devant la Cour d’Appel de Rennes, dès 14 h pour une séance qui pourrait durer tout l’après midi.
Nous appelons dès aujourd’hui tous les sympathisant.e.s à réserver cette date pour une nouvelle manifestation de soutien aux Faucheurs Volontaires
Rendez vous le 17 janvier 2023 – 14 h Cour d’Appel de Rennes
Article 1er. Chacun a le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé.
Article 2. Toute personne a le devoir de prendre part à la préservation et à l’amélioration de l’environnement.
Article 3. Toute personne doit, dans les conditions définies par la loi, prévenir les atteintes qu’elle est susceptible de porter à l’environnement ou, à défaut, en limiter les conséquences.
Article 4. Toute personne doit contribuer à la réparation des dommages qu’elle cause à l’environnement, dans les conditions définies par la loi.
Nous n’en avons pas fini avec leurs secrets toxiques !
APPEL À SOUTIEN – 4 faucheurs/faucheuse volontaires d’OGM sont convoqués le LUNDI 13 JUIN À 14H00 À LA COUR D’APPEL PLACE DU PARLEMENT RENNES
Venez nombreux….
Le rassemblement, à partir de 12H00, peut être festif… autant faire du
bruit…
Suggestions : pour les chanteurs venez avec vos répertoires de chants,
pour les musiciens avec vos instruments, pour tou.te.s vos rires et
votre bonne humeur habituelle…
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Les FAITS qui sont reprochés à Marie-Lise, Claude, Lucien et Yves, avoir «peinturluré» proprement, le 19 mars 2016, avec une trentaine d’autres faucheurs/faucheuses, dans 7 jardineries de la région de Quimperlé-Lorient (2 seulement ont porté plainte, ….sans les nommer Jardiland, Lanester et Carrefour, Lorient Keryado….), des produits contenant du glyphosate… (Pour une meilleure compréhension de notre action du 19 mars 2016, nous vous conseillons cette vidéo
Lors du jugement du 21/12/2017, le tribunal de Lorient, rejetait la demande de question préjudicielle auprès de la Cour de Justice de l’Union Européenne et déclarait coupables, Marie-Lise, Claude, Lucien et Yves de dégradation ou détérioration d’un bien appartenant à autrui (….c’est sûr, ça ne nous appartenait pas…) et les condamnait au paiement d’une amende à 200€ avec sursis pour deux d’entre eux et d’une amende à 200€ ferme pour les récidivistes.
Les 4 condamnés faisaient aussitôt appel de ce jugement.
Et c’est cette affaire qui sera examinée (5 ans déjà… quelle rapidité !) à l’AUDIENCE DE LA COUR D’APPEL DE RENNES, le lundi 13 juin, à 14H00.
Nous avons vraiment besoin de votre aide… et si certain.e.s désirent se rendre à Rennes, le covoiturage est fortement recommandé… Venez nombreux pour soutenir notre cause juste et venez écouter les délibérations de notre avocat et les témoignages percutants et censés de nos 4 témoins…
C’est avec le soutien de tou.te.s que nous obtiendrons la relaxe, lors de cet appel du 13 juin…
Marie-Lise, Claude, Lucien et Yves
DIFFUSEZ À VOS RÉSEAUX SANS MODÉRATION
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